Question des lecteurs et avantage statistique d’une approche « daubasses »

Ce petit exposé se veut une réponse détaillée à une question que nous a posée l’un de nos fidèles abonnés.

Cette question ou plutôt cette affirmation est la suivante : « La netnet n°15 ne vous procurera du rendement que si elle parvient à lancer avec succès des nouveaux produits. Dans la négative, ce sera la catastrophe ».

Ami lecteur, nous avons l’impression que vous regardez dans le rétroviseur et posez un jugement « après coup ».

Prenons un exemple, en 2008, quand nous achetons Taitron et Netlist. Il n’y a pas la moindre différence entre les deux sociétés. Si ce n’est que Taitron semble un peu plus solide : elle détient des actifs immobiliers, présente un Ebitda positif et, dans un passé lointain, a déjà été bénéficiaire alors que Netlist n’a jamais généré le moindre dollar de bénéfice, présente un Ebitda négatif et n’a qu’un peu de stock et de trésorerie à présenter comme collatéral.Et pourtant, le simple lancement d’un nouveau produit a propulsé le cours de Netlist dans la stratosphère et nous avons multiplié notre investissement de départ par 12 en quelques mois … alors que Taitron est resté sur place.

Avec la netnet n°15, c’est la même chose : quand nous l’achetons, c’est une « triple net » qui vaut donc moins que les liquidités qu’elle détient amputées de l’ensemble de son passif. La société est en difficulté car son produit vedette est en chute libre et la société ne parvient pas à lui trouver un remplaçant. Donc, quand nous achetons, nous avons une grosse marge de sécurité sur les actifs mais pouvons-nous savoir à ce moment-là s’ils vont trouver ce fameux nouveau « block buster » pour redresser la barre ? Non, reconnaissons humblement que nous n’en avons aucune idée.

Aujourd’hui, nous savons que la société a acquis un nouveau produit à distribuer sous licence et cela semble prometteur… mais nous n’avons toujours aucune idée du résultat final de ce contrat de licence sur la rentabilité de l’entreprise.

Peut-être sera-ce un « fiasco » avec un cours divisé par deux et ce ne sera qu’à la prochaine tentative de redressement que la réussite sera au rendez-vous …

Peut-être que la direction ne réussira jamais la recovery et qu’elle décidera de liquider sagement la société en distribuant aux actionnaires le produit de la vente et nous ne serions alors même pas perdant mais il se peut aussi que le cash soit intégralement « grillé » et que le cours de l’action aille irrémédiablement et définitivement à 0.

« Comment savoir donc au moment de l’achat ce qui va se passer ? »

Nous avons l’impression, cher lecteur, que vous n’avez pas tout-à-fait compris l’avantage statistique de la méthode Daubasse, avantage statistique qui est quand même le point central de notre approche.

« L’avantage statistique ? C’est quoi ? »

Pour les daubasses, c’est d’abord la répétition d’un process bien défini à l’intérieur duquel on achète des sociétés sous la valeur de leur actif net-net ou net estate.

Ensuite, l’avantage statistique va ressortir sur le nombre de sociétés achetées. Imaginons un panel de 10 lignes différentes. Sur ces 10 lignes, 3 sociétés vont voir leur cours être multiplié par 5, 3 sociétés vont faire faillite et 2 société vont rapporter 10% et les 2 dernières sociétés vont entraîner une moins-value de 10%. Le résultat final de l’opération, c’est que sur un investissement de 10, on récupère 12, soit un rendement de 20%.
Si, en plus, vous parvenez à éviter les 3 faillites et que vous avez toujours 3 sociétés qui multiplient leur cours par 5, que vous avez 3 sociétés qui vous font gagner 12% et 4 sociétés qui vous font perdre 9%, le résultat sera alors de 15, soit un rendement de 50%.

Un dernier exemple extrême de l’avantage statistique pour mieux comprendre : sur les 10 sociétés, vous avez le bonheur d’avoir acheté 2 daubasses du type Netlist qui font X12 et les 8 autre sociétés font faillite et donc valent zéro, vous récupérez alors 16 avec un rendement de 60 %.
Sur ce dernier exemple, vous pouvez dire que vous vous êtes trompés 8 fois sur 10 et que c’est quand même 8 erreurs graves… et pourtant, malgré ces 8 erreurs, le résultat de vos investissements, c’est une plus-value de 60%.

Si c’est réalisé en 1 an c’est exceptionnel, si c’est en 2 ans, c’est encore excellent, en 3 ans aussi. C’est encore pas mal en 4 ans et c’est honorable en 5 ans.
L’objectif de l’avantage statistique, ce n’est donc pas de gagner à chaque fois mais de donner les chances de gagner sur une certaine durée et avec un certain nombre d’actions en portefeuille.
Pour notre part, nous savons que nous n’avons pas les moyens d’éviter les 8 Taitron qui vont, peut-être, faire faillite mais, ce qui nous intéresse, ce sont les 2 Netlist qui vont à eux seuls dégager de la performance.

En modulant ça dans le temps, aucun investisseur ne peut savoir s’il va commencer par 5 faillites ou par deux baggers. Si le résultat final est identique, soit 60%, l’investisseur possède un avantage statistique pour résister psychologiquement parce qu’il faut bien reconnaître qu’il y a une différence psychologique énorme sur le fait de commencer par les 5 faillites avec les baggers qui suivent … que l’inverse quand ce sont les 2 baggers qui « boostent » au départ et, qu’ensuite, viennent les faillites.
Nous avons eu la chance en 2008 de commencer avec les baggers, mais, à ce moment-là, personne ne pouvait dire que nous n’allions pas commencer par 5 faillites avec nos 30 sociétés et perdre 15 ou 20% en quelques semaines. Nous savions juste que nous avions un avantage statistique et que, sur le moyen terme, au pire, nous ne perdrions pas grand-chose.
Aujourd’hui, c’est exactement pareil : nous avons en portefeuille 44 net-net et net-estate qui cotent à la moitié de leur actif net tangible. Nous ne savons pas lesquelles seront des baggers, lesquelles feront faillite et lesquelles vont stagner pendant 4-5 ou 10 ans … et cela ne nous intéresse que très moyennement.

Reste une question : pourquoi nous sommes convaincus qu’avec des daubasses, nous disposons d’un avantage statistique ?

Pour deux raisons :

La première est intuitive : l’un d’entre nous a cherché pendant plusieurs années à racheter une entreprise pour son propre compte. Il a étudié une trentaine de dossiers, visité une dizaine de sociétés et entamé des négociations pour la reprise de 4 d’entre elles. Mais jamais, au grand jamais, il n’a croisé une société qui, aussi médiocre soit elle, était négociable à un montant inférieur à la valeur de ses fonds propres (ne parlons même pas de son fonds de roulement net).

Dans la « vraie vie », les entreprises ne se négocient pas à des ratios « netnet » tout simplement. En toute logique, nous ne pouvons que conclure que celui qui achète en bourse un panier de ce genre de sociétés ne devrait pas faire une mauvaise affaire.

La seconde est précisément statistique : sur notre blog, nous avons publié 2 études « neutres » qui démontrent que, sur des longues périodes, une approche « netnet » a tendance à faire mieux que le marché : celle d’Henry Oppenheimer  et celle de James Montier.
Ce dont nous avons la conviction par contre, c’est que dans 5 ans et même avec Taitron ou Albemarle dans l’équipe, grâce à notre avantage statistique, nous avons de fortes chances d’être gagnant globalement et de générer de la plus-value. Mais, comme expliqué plus haut, nous pouvons aussi passer par trois années de faillite assez nombreuses avant que les baggers explosent. Cela nous n’en savons rien.
Tout ceci vaut aussi pour la nouvelle catégorie les RAPP : si, dans les années avenir, nous achetons 10-15 sociétés RAPP, nous disposerons également d’avantages statistiques.

 

2 réflexions au sujet de « Question des lecteurs et avantage statistique d’une approche « daubasses » »

  1. L’investisseur « intelligent » se doit d’avoir une perspective long terme et ne pas juger hâtivement ses résultats. Il semble que l’être humain ait du mal a se projeter sur le long terme en ce qui concerne l’investissement boursier.
    Cordialement

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