De l’intérêt d’aller aux Assemblées Générales 🧐🔭🤥

Millenium. Le nouveau concept de Softimat pour réduire les taux de vacance

 

Si vous nous suivez depuis quelques temps, vous savez le peu d’intérêts que nous portons aux éléments subjectifs tels que les salons, et autres rencontres pour institutionnels, où est distribuée la même soupe que celle des communiqués de presse des sociétés. Certes, ces événements flattent les égos : se rencontrer entre « costards-cravates », manger quelques canapés, se raconter quelques blagues sur les niveaux de l’Eurostoxx50 ou bien spéculer sur le prochain cours du Brent une coupe de champagne à la main… quel pied ! Tout un tas de banalités qui n’apportent rien de bien important pour l’investisseur rationnel. Mais pour un gérant de portefeuille, on peut comprendre qu’il justifie une partie des commissions reçues par ses clients (de 1% à 3% des fonds sous gestion) en se promenant, parfois à travers la France, voire l’Europe, dans ces petites sauteries mondaines.

Bref, dans le même ordre d’idées, se rendre à une Assemblée Générale (AG) d’une entreprise du gabarit type CAC 40 apporte le même lot de satisfactions : rien. Sauf, si bien entendu, vous êtes adepte de mousseux et de petits fours et que vous n’avez absolument aucune autre priorité.

Nous préférons nous consacrer à l’analyse des bilans, chercher des décotes sur les actifs (des anomalies de valorisations), acheter au rabais et diversifier.

 

Aucun intérêt vraiment ?

Pensez-vous, par exemple, que le PDG de Total va annoncer en AG une nouvelle information fondamentale, inédite, qui n’ait pas déjà été annoncée au public par avant ? Bien-entendu, non, c’est impossible. L’armée d’analystes financiers qui suit une société de cette taille est sensée avoir les mêmes informations que tout le monde à tout moment. Et surtout, ce sont parfois des centaines d’actionnaires qui sont réunies en même temps. Et donc, imaginons qu’un nouvel élément soit dévoilé, aussi anodin soit-il, lors d’une réunion de ce type, aucune chance de pouvoir en tirer un quelconque avantage puisqu’il sera tout de suite incorporé dans la valorisation de tous les investisseurs présents.

Ce n’est pas du tout la même donne avec les entreprises de taille plus modeste qui n’attirent en AG qu’un nombre très restreint d’actionnaires du fait de plusieurs facteurs : une communication financière moins abondante, d’un suivi inexistant par des analystes financiers ou de sociétés de gestion, d’un siège social localisé loin des grandes métropoles et avec parfois presque aucun investisseur institutionnel au capital, … autant de raisons pour que les AG des plus petites entreprises soient désertes.

Et nous pensons que c’est dans ce type d’AG qu’il est possible, tout en restant bien entendu dans les limites du droit (délit d’initié), de glaner quelques informations stratégiques intéressantes. Il est dans ces conditions plus simple d’échanger en direct avec le management sur un point de gestion, l’interprétation de données financières ou simplement sur le plan d’affaires de l’entreprise à moyen terme que dans un amphithéâtre rempli à craquer et avec l’équipe dirigeante sur scène derrière leurs pupitres.

 

Les risques

Vous êtes seul, ou bien avec 2 ou 3 braves gens, face à une équipe aux commandes de l’entreprise depuis plusieurs années. Pensez-vous réellement que vous allez réussir à démêler le vrai du faux, l’optimisme du pessimisme, … ? Votre connaissance de l’entreprise se limite pour vous à la lecture des résultats financiers, depuis plusieurs années dans le meilleur des cas. Les plus zélés des actionnaires se sont même renseignés sur les produits de l’entreprise. Génial ! Mais insuffisant pour juger de la pertinence d’un discours bien construit pour noyer le poisson.

 

Softimat : l’AG type pour l’investisseur individuel

L’entreprise belge coche toutes les cases de l’AG qui va être déserte : petite capitalisation, aucun analyste qui suit la société, aucun institutionnel à l’horizon, pas de dividendes depuis des années, une liquidité du titre faible et un siège social localisé à 20 km de Bruxelles. Tout est bon ! Vous avez de grandes chances d’être seul en plus des deux actionnaires historiques qui viennent tous les ans pour boire un hypothétique verre de vin en fin de réunion.

Le cru 2018 semble avoir été un peu plus mouvementé que prévu, puisque un des membres de votre équipe a envoyé quelques questions au management (qui nous a valu un procès ! Ou comment une équipe de direction essaie de faire taire un site qui fédère des actionnaires et blog lui-même actionnaire…), notamment sur les rémunérations jugées excessives et qui ont motivées le management à sortir le grand jeu.

En effet, les actionnaires ont été reçus comme à une réunion d’analystes, avec la distribution d’une présentation papier forte utile, en plus d’une introduction de près de 30 minutes digne d’un meeting politique de campagne électorale et pour finir sur une conclusion dithyrambique sur les qualités et le travail effréné de l’équipe dirigeante.

Si l’émotion a souvent dépassé le cadre des éléments factuels et a ainsi dénaturé la puissance des propos, il faut reconnaître qu’il y a eu un gros travail de fonds pour expliquer d’où vient la société, ce qu’elle est devenue au fil des ans et comment le projet en cours se réalise avec une projection à moyen terme plus ou moins évidente à valider.

Le risque essentiel de l’actionnaire face à une telle éloquence – et à des annonces plus positives les unes que les autres -, est de manquer de recul et de se prendre alors pour le nouveau Buffett qui est actionnaire d’une potentielle pépite incroyable ! Oui, il ne faut pas se leurrer sur le discours d’une telle équipe.

Si vous obtenez des informations orales qui ne sont pas diffusées par la suite dans un communiqué officiel, libre à vous de l’interpréter comme vous le voulez. Si cette nouvelle est si fondamentale que cela, il y a un risque d’initié. Et il est peu probable qu’un management, même le plus équilibriste (les « surfeurs de lignes jaunes »), ne prenne le risque de vous dévoiler quelque chose qui pourrait changer complètement le paradigme. Que ces informations soient positives comme négatives.

Et l’AG de Softimat ne déroge pas à la règle. S’il est arrivé au membre de votre équipe présent, ce mardi 29 mai à Lasne, d’être à deux doigts de lâcher une larme quand Nicolas Logé (administrateur et « directeur » financier), d’une voix forte et tremblante, a expliqué le drame de la cession de l’activité Systemat, puis le départ des principaux locataires qui a failli ruiner l’entreprise, la force de conviction s’est avérée finalement être au service d’un argumentaire élogieux et incroyablement détaillé dans le but de tenter de justifier le niveau stratosphérique actuel des rémunérations du management…

N’avalez donc pas toutes les couleuvres ! Les dés sont largement pipés. Le management a toutes les informations et vous dévoile les stricts éléments obligatoires légaux et peut être quelques facettes de la stratégie que vous n’avez pas su interpréter dans des communiqués. Rarement plus.

 

Quelques réponses

Cette AG a permis de tirer plusieurs enseignements :

    1. Le conseil d’administration n’a aucunement l’intention de revoir la rémunération des administrateurs, même si elle est excessive par rapport à la taille de la société, ses résultats et à ce qui se fait dans le secteur
    2. Softimat n’a pas besoin de capitaux (aucun endettement) et ne devrait pas avoir besoin de lever des capitaux en bourse à moyen terme. Le management se contentera donc du minimum strictement légal pour une entreprise de cette taille cotée sur Alternext (Euronext Growth aujourd’hui) = pas d’administrateur indépendant, pas d’informations trimestrielles, pas d’annonce de franchissement de seuils sous 25%, pas de comité de rémunération, … ;
    3. Un conseil d’administration de façade, non présent à l’AG, qui est à la botte du directeur général (Bernard Lescot) et du « directeur » financier (Nicolas Logé), par ailleurs eux-mêmes administrateurs et actionnaires de la société ;
    4. Des éléments de langage particuliers qui démontrent que l’actionnaire minoritaire est un dommage collatéral historique de la cotation de l’ex-Systemat mais qu’il n’est nullement considéré dans la stratégie future avec des remarques du style : « si vous n’êtes pas content de notre gestion, vous pouvez vendre vos actions ! Personne ne vous oblige à les garder ! Il y a un programme de rachats d’actions pour ça !« . Vous conviendrez qu’on a déjà entendu discours plus shareholder friendly.

Ce qui est intéressant avec ce type de rencontre est donc de pouvoir lire entre les lignes. Et surtout de palper l’ambiance et comment le management répond et réagit à vos questions. Cela peut être un plus par rapport à une communauté d’investisseurs scrutés derrière leurs écrans d’ordinateurs.

N’oubliez pas d’aller en AG, et de voter. C’est certes un droit, et non un devoir, mais cela vous permet toujours de vous faire votre propre opinion sur l’équipe qui utilise vos capitaux.

Accessoirement vous pouvez aussi récupérer quelques objets mythiques, comme ici (cf. photo), un verre à l’effigie de la nouvelle marque et stratégie de Softimat : Millenium, le concept de bureaux à usage professionnel partagés. Ce haut fait d’arme, acte de bravoure dans le code de chevalerie daubassienne, vaut (presque) tous les dividendes du monde !

Enfin, notre déplacement et tout notre travail n’auront pas été vains pour l’ensemble des actionnaires qui ne vont pas en AG, puisque la présentation distribuée physiquement a bien été mise en ligne sur le site de la société, comme nous l’avions demandé :

http://www.softimat.com/documents/finance/Presentation-AG-2018-SOFTIMAT.pdf – un effort de communication inédit qu’il faut souligner.

 

Pour conclure, laissons la parole à Florent, un fidèle et heureux abonné aux daubasses, présent à l’AG :

« En tant qu’abonné de longue date et détenteur de quelques actions Softimat, la tentation de voir l’équipe des Daubasses en action était trop belle pour être refusée !

Et bien, il faut reconnaître que je n’ai pas été déçu. D’une part, les questions posées par l’équipe ont « piqué le management à vif » qui s’est lancé dans une présentation et un historique de la société très détaillé, et d’autre part, cela m’a permis de voir le travail effectué en amont de cette AG (et de toutes les analyses proposées en fin de compte) par l’équipe des Daubasses, et qui est impressionnant. Comme expliqué dans le compte-rendu ci-dessus, le droit des actionnaires d’avoir leur opinion et de l’exprimer (sous quelque forme que ce soit) est un droit fondamental de l’esprit d’entreprise et il ne faut pas le négliger. Nous pouvons être dès lors être certains qu’avec un actionnaire tel quel les Daubasses, notre droit à la revendication et à l’analyse des résultats de Softimat ne sera certainement pas laissé pour compte.

Pour la petite histoire, je ne suis malheureusement pas en mesure de confirmer l’appétit des Daubasses pour l’Orval puisque j’ai dû arriver au moment de la seule rupture de stock de toute l’existence du site… »

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