Archives de catégorie : Bas les masques

Quelques analyses dévoilées

Bas les masques : Cycle Country Accessories

Nous poursuivons ici le « démasquage » de sociétés que nous avons vendues fin janvier. Après Giga Tronics, voici la deuxième société que nous vendons parce qu’elle ne répond plus à nos critères. Il s’agit de Cycle Country Accessories. Les prochains articles porteront sur les sociétés que nous comptons vendre prochainement pour des raisons plus heureuses : à savoir une sortie « par le haut ».

Comme vous pourrez le constater à la lecture de l’analyse que nous avions mise à la disposition de nos abonnés au moment de l’achat (fin 2009), nous avions basé pas mal d’espoir sur Cycle Country Accessories et surtout sur sa capacité à générer des bénéfices dans le futur.

Malheureusement, ce retour aux bénéfices n’a pas (encore) eu lieu mais, plus grave, le 23 janvier, nous apprenions que la société était menacée de delisting par la SEC pour avoir publié dans ses rapports de gestion, un nombre erroné d’actions en circulation. 

La coupe était pleine et nous liquidions cette ligne en subissant une moins-value d’une quarantaine de pourcents.

De cette affaire, nous avons tiré deux conclusions qui ne sont en réalité que deux confirmations :

          Ne jamais espérer un retour aux bénéfices comme principal catalyseur d’une hausse de cours : ce retour est incertain et ne peut constituer qu’une cerise sur le gâteau mais non l’élément nécessaire à une revalorisation de l’action

          Une fois de plus, nous découvrons ici les vertus de la diversification : le fait de ne pas avoir consacré plus de 3 % de notre portefeuille sur une ligne qui nous semblait alléchante au départ nous a permis de ne pas payer trop cher notre choix erroné.

 

Voici donc, pour votre information, l’analyse que nous avions mise à disposition de nos abonnés au moment de notre acquisition. Nous vous en souhaitons une bonne lecture.

 

I. Introduction

Cycle Country Accessories Corp. est le résultat de la fusion, en 2001, entre Cycle Country Accessories Corp. (fondée en 1983) et Okoboji Industries Corporation. Le groupe est l’un des plus grands fabricants au monde d’accessoires pour quad. Selon la direction, les produits sont de hautes qualités.

La clientèle est composée de 9 distributeurs en Amérique du Nord et 11 distributeurs internationaux qui vendent les articles de Cycle Country dans 30 pays différents.

Mais l’entreprise est aussi le plus gros fabricant d’enjoliveurs pour voitures de golf au monde (70 % du marché). Elle fabrique également des accessoires pour tondeuses.

Les trois principaux clients (qui achètent les produits Cycle Country depuis plus de 20 ans) représentent 53 % des ventes. La direction souhaite, à l’avenir, réduire le poids de ces acteurs dans les ventes grâce à la croissance des autres branches d’activité.

A l’origine, l’entreprise fabriquait des lames de chasse neige adaptées pour les quads. Aujourd’hui, sa gamme comprend des socles de charrue, des pulvérisateurs, des tondeuses, des herses, des attaches remorques, des treuils, …

Entre le 17 et le 25/11/2009, nous avons constitué notre ligne en Cycle Country Accessories Corp au prix de revient, frais de courtage inclus, de 0,405 usd. Nous travaillons avec les chiffres de 9 mois d’exercice, arrêtés au 30/06/09 (l’année comptable est clôturée le 30/09).

 

II. Valeur d’actif net net (VANN)

Nous avons acheté un actif courant de 1,947 usd par action (dont le poste principal est constitué des stocks qui pèsent à eux seuls 1,322 usd). Nous avons déduit les dettes représentant 2,574 usd par action. La valeur d’actif net net est donc négative de 0,627 et nous n’avons donc aucune marge de sécurité sur cette valeur.

 

III. Valeur d’actif net estate (VANE)

Dans les comptes de l’année 2008 (le détail est absent lors des clôtures trimestrielles mais il ne semble pas y avoir eu de grosses cessions d’actifs sur ces 9 premiers mois), nous apprenons que la société possède des terrains et constructions pour une valeur d’acquisition de 1,884 usd. Nous appliquons une marge de sécurité de 20 % sur cette valeur, l’ajoutons à la VANN et obtenons une VANE de 0,880 usd. Nous avons donc acquis nos actions avec une marge de sécurité sur cette valeur de 54 %.

 

IV. La Valeur en cas de mise en liquidation volontaire (VLMV)

Revenons tout d’abord sur l’actif courant.

Nous n’avons, lors du calcul de la VANN, effectué aucun redressement pour ralentissement de la vitesse de rotation des actifs courants. Est-ce à dire que nous pouvons prendre pour « argent comptant » les valeurs qui nous sont données par la direction ?

Nous nous penchons tout d’abord sur le stock qui représente, à lui seul, 68 % de la valeur totale de l’actif courant. Nous constatons tout d’abord que la direction, dans sa grande prudence, a acté des dépréciations équivalentes à 12,7 % de la valeur brute du stock. Nous constatons aussi que le stock représente un peu plus de 3 mois et demi d’activité, ce qui ne nous semble pas excessif pour une entreprise « à intégration verticale » (la société a acheté en 2005 son fournisseur de pièces en acier) et qui fabrique de nombreuses « bricoles ». Néanmoins, nous allons prendre une marge de sécurité complémentaire de 20 % et amputons donc la VANE de 0,264 usd.

Nous décidons également de reprendre les impôts différés pour 0 et amputons la VANE de 0,177 usd complémentaires.

Nous passons à présent aux actifs immobilisés.

Outre l’immobilier, nous trouvons des actifs tangibles sous forme de machines, outillages, équipements de bureau et véhicules pour 0,455 usd par action en valeur d’acquisition. Nous les reprenons pour 10 % de cette valeur, soit 0,046 usd.

Conformément à nos habitudes, nous ne tenons pas compte des actifs intangibles.

Hors bilan, nous constatons des obligations d’achat de matériel pour 0,171 usd par action.

Enfin, il existe des stock options dont nous ne tenons pas compte, le prix d’exercice étant largement supérieur à la valeur de mise en liquidation.

Nous établissons donc la VMLV comme suit :

– VANE : 0,880

– Marge de sécurité sur stock : – 0,264

– Elimination des impôts différés : – 0,177

– Installations, machines et outillages : 0,046

– Obligations d’achat : – 0,171

Soit une valeur en cas de mise en liquidation volontaire de 0,314 usd. Nous n’avons donc pas de marge de sécurité sur cette valeur.

V. La valeur de la capacité bénéficiaire (VCB)

Au cours des 10 dernières années, la société n’a jamais généré que des profits nets… sauf en 2008 et probablement en 2009. En 2009, la perte devrait même probablement être considérée comme « record ».

En effet, sur les 9 premiers mois de 2009, la perte d’exploitation s’élève à la somme astronomique de 2,05 usd par action. Nous avons néanmoins l’impression que si la société est bel et bien touchée par la crise (son chiffre d’affaires ne représente plus que le tiers de ce qu’il était l’année précédente sur la même période), la direction a  également procédé à un véritable « windows dressing » ou « nettoyage de bilan » en vue de présenter des résultats bien plus favorables dans les années qui viennent.

Mise à 0 du goodwill et réductions de valeur massives sur les stocks : sans ces opérations, la perte d’exploitation ne se serait élevée qu’à 0,31 usd. De quoi la relativiser. Ajoutons à cela le fait que l’Ebitda reste positif au cours de ces 9 premiers mois et vous comprendrez que nous n’avons que peu de craintes pour la survie à moyen terme de Cycle Country Accessories.

Nous pensons que dans le futur, la société sera capable de générer un résultat d’exploitation après impôt équivalent à la moyenne des 6 dernières années, impôts déduits et année 2009 comprise, soit 0,11 usd par action. Nous déduisons 0,05 usd de charges d’intérêt et fixons la VCB de Cycle Country Accessories Corp., actualisée à 11 %, à 0,55 usd par action.

 

VI. En conclusion

A notre prix de revient de 0,405 usd, nous avons obtenu :

Une marge de sécurité de :

54 % sur la VANE

26 % sur la VCB

Nous avons donc acheté une entreprise en payant plus cher que sa valeur de mise en liquidation volontaire. Mais cette VMLV qui constitue aussi la valeur minimale de l’entreprise n’est pas si loin de notre prix d’achat : 25 % plus bas. Cette valeur de mise en liquidation constitue pour nous la valeur plancher de l’entreprise. Pour la première fois, nous avons acquis une entreprise dans le but de la voir renouer avec les profits. En effet, nous pensons que Cycle Country Accessories constitue une « vraie » entreprise cyclique (comme son nom l’indique) et que les pertes encourues sont essentiellement dues à une période économique défavorable.

Nous pensons que la société redeviendra bénéficiaire avec la reprise économique.

.

Analyse financière : Les actifs d’impôt différés … attention piège à c …

Comme annoncé, nous allons vous dévoiler, cher(e) lecteur(trice), l’ensemble des positions arrivées à maturité  depuis le début de cette année et ce, au fil de différents articles successifs.

La première, c’est Giga Tronics. Nous avions acheté cette société le 11 octobre 2011 au coût de revient, frais de courtage inclus, de 1,3296 usd. Ci-dessous, vous pourrez lire l’analyse qui nous avions mis à disposition de nos abonnés et qui présentait nos motivations d’achat. Sa Valeur d’Actif Net Tangible était alors 4,62 usd.  otre marge de sécurité était donc, en apparence, assez conséquente.

Pour rappel, nous calculons de la Valeur d’Actif Net Tangible en amputant des capitaux propres les actifs intangibles, c’est-à-dire les actifs « qu’on ne peut pas toucher », dans notre cas le goodwill et les immobilisations incorporelles.

Jusqu’à présent, nous ne considérions pas les actifs d’impôts différés comme un actif intangible.

 

>> « C’est kwaaaa un actif d’impôts différés ? »

Il s’agit de « droits » pour une société de déduire, dans le futur, des charges constatées dans le présent. Par exemple : les provisions pour pension sont prises en charge dans les comptes lorsqu’elles sont constituées par l’entreprise mais ne seront déductibles fiscalement que lorsque l’entreprise procédera au paiement de celles-ci ou encore les pertes fiscales subies lors d’un exercice qui ne pourront être déduites que dans le cadre de bénéfices futurs. Dans certains pays, des frais de recherches et développement peuvent donner droit à des déductions fiscales supplémentaires lors d’exercices fiscaux futurs.

Ainsi donc, comme nous le précisions plus haut, nous considérions, jusqu’à présent, ces droits comme des actifs tangibles puisqu’ils représentaient bien de l’argent à valoir dans le futur que ce soit parce que la société générera des profits  ou parce qu’un éventuel repreneur pourrait s’en servir en cas de relance de l’outil. Néanmoins, il existe une condition pour que ces actifs puissent présenter une  réelle valeur : que la société, d’une manière ou d’une autre, génère dans l’avenir des profits imposables. Et c’est là que le bât blesse …

Ainsi, pour revenir à Giga Tronics, la direction a considéré que ces actifs d’impôts différés ne pourraient pas être réalisés dans un avenir plus ou moins proche et a décidé, ni plus ni moins, d’acter une réduction de valeur sur ce poste, estimant qu’il ne valait plus rien. Nous ne pouvons que saluer la prudence de la direction quant à la valorisation des actifs présentée dans les rapports financiers… malheureusement, cette prudence, sur ce coup-là , ne nous arrange pas du tout. En effet, suite à cette opération cumulée à d’autres réductions de valeur sur les stocks et une perte d’exploitation « ordinaire », la VANT de Giga Tronics s’est effondrée à 1,50 usd … SOUS le cours de l’action au moment où nous prenions connaissance de ces évènements.

Même s’il est possible que la direction ait voulu « charger la barque » et présenter « des comptes bien nets », la discipline que nous nous imposons nous a contraint à vendre cette ligne, pourtant prometteuse, sans aucune hésitation.

Certes, la plus-value de 18 % obtenue en trois mois n’est pas négligeable mais nous nous sentons un peu « frustrés » par rapport à nos espoirs d’une appréciation de notre investissement bien plus conséquent au départ.

De cette aventure, nous avons tiré une conclusion sans appel : non, les actifs d’impôts différés ne sont pas des actifs tangibles. Tout au plus pouvons-nous les considérer comme « des cerises sur le gâteau » mais certainement pas comme un part intégrante de la valeur fondamentale de la société analysée et, à l’avenir, c’est de cette manière que nous les considérerons.

Nous vous laissons découvrir à présent, quelle a été notre réflexion, in illo tempore non suspecto, au sujet de Giga Tronics, réflexion que nos abonnés ont pu découvrir dans une précédente lettre mensuelle. Nous vous en souhaitons une bonne lecture.

 

Giga-tronics Inc.

(Nasdaq, Ticker: GIGA / ISIN : US3751751062)

I. Introduction

Giga-tronics avec son super nom high tech futuriste, est une entreprise américaine cotée sur le NASDAQ qui produit un tas de bidules très sophistiqués qui ont l’air très cools, mais dont, nous devons bien vous l’avouer, nous ne comprenons pas grand-chose…

C’est un fabriquant leader en ingénierie et conception de best-in-class RF et de générateurs de signaux micro-ondes, amplificateurs de puissance micro-ondes, de capteurs de puissance USB, mesureurs de puissance micro-ondes, ATE signal de commutation et d’unité d’interface RF (RFIU) de composants micro-ondes et sous-ensembles.

La R & D, la production et les gestionnaires de test, les scientifiques, les ingénieurs et techniciens sont implantés mondialement. Ils utilisent et testent les équipements de Giga-tronics dans le but d’améliorer la productivité et de faciliter l’utilisation dans de nombreuses applications: systèmes ATE, aérospatiale et défense, communications et toutes sortes de tests à composante micro-ondes.

Son siège social est localisé à San Ramon en Californie. La société est certifiée ISO 9001 et AS 9100 entreprises et emploie environ 100 personnes.

En date du 25.06.2011, son carnet de commande représente 5,7 M USD (pour un CA annuel en 2011 de 21 M USD – exercice clos le 26.03.2011). L’entreprise est dépendante du marché électronique de la défense, ainsi que du marché des télécommunications sans fils. L’administration américaine et plus particulièrement le ministère de la défense américain sont les plus gros clients de Giga-Tronics.

Nous avons acquis des titres le 11 octobre à un coût de revient, frais inclus, de 1,3296 USD.

Nous avons tenu compte dans nos calculs d’une dilution potentielle de 851 889 actions liées à des options exerçables à un cours de 1,93 USD, ainsi que 90.000 actions qui seront allouées au management si des objectifs sont atteints en 2013. Pour ces dernières, le prix d’exercice est de 2,34 USD. Nous en tenons compte dans la dilution même si la direction estime que les objectifs ne seront pas atteints (sic!) et ne permettront pas la distribution de ces titres.

 

II. La Valeur d’Actif Net Net (VANN)

Sur base des comptes arrêté au 25 juin 2011, la valeur d’actif net-net s’élève à 1,96 USD par action. A notre prix d’achat, la marge de sécurité est donc de 32%.

 

III. La Valeur d’Actif Net Estate (VANE)

L’entreprise ne détient aucun immeuble ou terrain, il nous est donc impossible de calculer la VANE.

 

IV. La Valeur de Mise en Liquidation Volontaire (VMLV)

Nous raisonnons sur l’analyse suivante en données potentiellement totalement diluée avec les données financières publiées au 25.06.2011.

Commençons par les actifs les plus liquides : l’actif circulant. Tout d’abord, son plus gros poste : les stocks. Ils représentent une valeur de 0,95 USD par action. Même si la rotation des stocks d’une moyenne de 186 jours les trois dernières années s’améliore sur le dernier exercice à une rotation de 162 jours, le niveau reste élevé. La prudence est donc de mise, surtout que les produits sont hyper spécialisés et très technologiques, donc également rapidement obsolète. Par prudence, nous allons appliquer une marge de sécurité de 50%, et reprenons ainsi un montant de 0,48 USD par action.

Le second poste de l’actif circulant le plus important est le cash. Il représente 0,61 USD par action et n’appelle aucun commentaire.

Viennent ensuite les créances clients. Elles représentent au bilan 0,33 USD par action. Malgré la (toute relative) qualité de son principal créancier (l’Etat américain), nous constatons que sur le dernier exercice, les délais moyens de paiement ont augmenté par rapport aux années précédentes (+15 jours en moyenne) à 98 jours. Dans ces conditions, nous préférons prendre une marge de sécurité de 30%. Ainsi, nous retenons un montant de 0,23 USD par action.

Les équipements et outils sont amortis à hauteur de 97% dans le bilan. Nous ne sommes pas en mesure d’évaluer ce poste du bilan d’un point de vue économique. Cependant, reprendre le montant inscrit au bilan, soit une valeur nette représentant 3% du coût d’achat semble conservateur. Ainsi, c’est 0,09 USD que nous ajoutons à la VMLV.

Enfin, dans l’actif circulant et l’actif immobilisé nous retrouvons un poste qui représente le plus gros morceau des actifs de Giga Tronics : les reports fiscaux. Ils représentent en effet un montant de 2,27 USD par action. Dans le cadre d’une mise en liquidation de l’entreprise, même volontaire, cet actif intangible ne vaut finalement pas grand-chose. En effet, seulement en cas de continuité d’activité et de génération de profits ces actifs ont une valeur. C’est pourquoi nous valorisons ces reports fiscaux déficitaires pour 0 dans le calcul de la VMLV.

A tout cela, nous retranchons tout le passif du bilan, soit 0,41 USD par action.

Nous n’avons pas trouvé de hors-bilan dans les comptes.

Pour résumer :

  • + stocks = 0,48
  • + cash = 0,61
  • + créances clients = 0,23
  • + équipements = 0,09
  • – passif = -0,41

= 1,00 USD par action

Par rapport à notre prix d’achat, suivant notre approche conservatrice, il n’y a aucune marge de sécurité sur la VMLV.

 

V. La Valeur de la Capacité Bénéficiaire (VCB)

L’entreprise a généré des profits opérationnels de bons niveaux sur les exercices 2011 et 2010 pour respectivement 847 k USD et 1 302 k USD. Malheureusement, du fait des pertes sur les exercices 2009, 2008 et 2007, il nous est impossible de calculer une VCB car la moyenne des résultats opérationnels des cinq dernières années est négative.

 

VI. Conclusions

Nous avons donc pu acquérir des actions de Giga-Tronics avec une marge de sécurité de :

32% sur la VANN

Au-delà de l’évidente décote sur son actif net-net (le genre de cible privilégiée par Benjamin Graham et Warren Buffet) Giga-Tronics présente selon nous un double intérêt spéculatif. Ce que nous appelons des « cerises ».

Tout d’abord, un élément non quantifiable mais qui a certainement de la valeur : ce sont les frais de recherche et développement. L’entreprise a dépensé pour son compte propre (en fait nous excluons la R&D externalisée pour le compte des clients seuls) la somme de 11,6 M USD en R&D ces 5 dernières années. Soit l’équivalent de 153% de sa capitalisation boursière potentielle diluée ! De toute évidence, cette entreprise possède un savoir-faire dans les émissions micro-ondes qui vaut quelque chose. Et encore, nous n’avons valorisé ici que les dépenses des 5 dernières années, alors que la société technologique existe depuis maintenant plus de 30 ans…

L’autre petite surprise dans le bilan de la société, ce sont ses pertes fiscales reportables. Elles atteignent 13,5 M USD. Un montant largement supérieur à la valeur de l’entreprise en bourse. De deux choses l’une. Soit l’entreprise confirme sa croissance rentable et est alors assurée de ne pas payer d’impôts sur ses bénéfices pendant un paquet d’années. Ce qui signifie alors que les résultats opérationnels sont égaux aux résultats nets (hors exceptionnels).

Ou bien, un concurrent un peu malin peut faire d’une pierre deux coups : il rachète la société et profite non seulement de toutes les connaissances et compétences liées à la R&D acquises au cours des 30 dernières années, mais également d’une superbe réduction d’impôts de plus de 13 M USD. Ce serait un achat, cher lecteur, que nous estimons tout à fait rationnel.

Enfin, nous avons constaté en fouillant les publications financières des dernières années, que la société est en croissance : aussi bien au niveau de l’activité (+9% en 2010 ; +10% en 2011) qu’au niveau de la rentabilité (résultat opérationnel moyen des deux dernières années = 1,07 M USD pour une capitalisation boursière de 6,42 M USD avant dilution, ou 7,60 M USD totalement diluée).

Sans vouloir préjuger du futur, ni de la tendance continue ou non de la croissance rentable actuelle, nous avons avec Giga-Tronics un collatéral de qualité qui pourrait sérieusement tenter une entreprise concurrente si le cours de bourse continue à ne pas refléter la valeur patrimoniale de ses actifs.

<< Les actifs intangibles : Pourquoi sont-ils difficiles à valoriser ?

>> Évaluer la compétence des dirigeants : faire preuve de bon sens

Bas les masques : Conn’s

Cela faisait longtemps, cher(e) lecteur(trice) que nous n’avions plus démasqué de lignes de notre portefeuille. Nous vous proposons donc de dévoiler une des sociétés de notre portefeuille, société dont le cours actuel représente environ le double (+100% !) de notre coût d’acquisition il y a moins d’un an.

Cet achat provient d’une démarche un peu particulière que nous vous avions exposée sur notre blog : l’émission d’option put.

Le 24 juin 2010, nous avions émis des options put sur l’action Conn’s à un prix d’exercice de 5 usd échéance janvier 2011. Pour ces options, nous avons encaissé, après déduction des frais, 0,60 usd par option. 

Notre raisonnement était le suivant : si, à l’échéance, le cours de l’action était supérieur à 5 usd, nous aurons généré pour nos liquidités un rendement brut de 12 % en 7 mois (0,60/5). Si le cours de l’action se situait sous les 5 usd, nous étions alors obligé d’acheter les actions au cours de 5 usd.  Ce qui amènerait notre prix de revient à 4,40 usd (5 usd – 0,60 usd de prime encaissée) … et c’est ce qui s’est passé : le 18 janvier 2011, le cours de la société se situait à 4,46 usd et nous avons donc été contraints de payer 5 usd pour acquérir nos actions. Il s’agit de la société n°17 dans la situation du portefeuille au 21 octobre.

Avons-nous sombré dans les affres et les angoisses ?

Absolument pas.  Tout simplement parce que nous avions la conviction que la société valait bien plus que ces fameux 4,40 usd décaissés. 

Nous vous expliquons pourquoi dans l’analyse ci-dessous qui est, en réalité, le simple « copié-collé » de l’analyse que nous avions mis à disposition de nos abonnés à l’époque.

Conn’s Inc

Conn’s a été fondée en 1890. Il s’agit d’une chaîne de magasins de détail spécialisés en « électronique grand public ». La société commercialise 3 000 références différentes essentiellement des téléviseurs, appareils photos, PC, blu- ray, DVD, GPS et home-cinema mais aussi électro ménager (réfrigérateurs, lave-vaisselle, cuisinière, …), du mobilier et du matériel de jardinage (comme des tondeuses à gazon). L’entreprise commercialise la plupart des grandes marques du domaine.

 

Fin 2009, son réseau se composait de 76 magasins, ce qui en fait un acteur relativement modeste dans son segment.

La société réalise une bonne partie de ses ventes à crédit et notamment au travers de deux programmes de crédit : un portefeuille de crédit principal reprenant les débiteurs ordinaires et un portefeuille de crédit secondaire reprenant les débiteurs « à risque » bénéficiant de conditions financières moins intéressantes. Cette activité de crédit semble importante pour Conn’s en terme de fidélisation de la clientèle.

La société commercialise aussi des « assurance solde restant dû » sur ces crédits.

En cas d’exercice, le prix de revient de nos actions Conn’s sera donc de 4,40 usd ( 5 usd – 0,60 usd). Nous travaillons avec les comptes arrêtés au 30/04/2010.

 

I.                   La Valeur d’Actif Net Net (VANN)

Un rappel technique sur cette notion ici

Nous avons acquis un actif courant de 35,67 usd essentiellement composé de créances (les en cours de financement aux clients) pour 29,16 usd. Nous avons déduit les dettes pour 24,61 euros ainsi que 0,105 usd en raison d’un ralentissement dans la rotation des stocks. La VANN s’établit donc à 10,96 usd par action et, à notre hypothétique coût d’achat de 4,40 usd, notre marge de sécurité s’établirait à 60 %.

 

II.                 La Valeur d’Actif Net Estate (VANE)

Un rappel technique sur cette notion ici

Nous constatons que la société est propriétaire d’immeubles acquis pour un montant de 0,79 usd. Nous prenons notre traditionnelle marge de sécurité de 20 % sur cette valeur et l’ajoutons à la VANN : nous obtenons une VANE de 11,59 usd par action.

 

III.              La Valeur en cas de Mise en Liquidation Volontaire (VMLV)

Un rappel technique sur cette notion ici et ici

Nous revenons d’abord sur l’actif courant et tout d’abord sur le principal poste du bilan : les créances qui représentent 75 % de l’actif de la société.

Avec un tel poids dans la valeur de la société, il est important de se pencher sur son degré de recouvrabilité. D’abord, nous constatons que la direction a d’ores et déjà acté des réductions de valeur équivalentes à 5 % de leur montant brut.

Or, nous constatons qu’au cours des trois derniers exercices comptables, Conn’s a supporté des pertes réelles sur créances de respectivement 2,9 %, 3,2 %, et 3,9 % soit largement sous les 5 % actuellement provisionnés.  La valeur de l’encours tel que présentée dans les comptes nous semble donc refléter la réalité et ce, de manière prudente. 

Néanmoins, comme nous aimons les bonnes surprises, nous allons considérer que la perte potentielle sur l’en cours actuel représente le double de ce qu’elle a été au cours de l’année 2009 soit 7,8 %.  Nous allons donc, sur le total des créances inscrites au bilan, acter une marge de sécurité supplémentaire de 2,8 % (7,8 – 5).  Cette marge de sécurité sera donc de 0,82 usd par action.

Parmi les autres postes de l’actif courant,  nous relevons le stock qui représente 71 jours de vente.  Si nous pouvons comprendre la nécessité de présenter une large gamme de produits pour satisfaire au mieux la clientèle, l’importance de ce montant, son évolution à la hausse et le fait que certains de ces articles pourraient être soumis à une vétusté rapide nous incite à prendre une marge complémentaire de 20 % par rapport à sa valeur aux livres, soit 0,79 usd.

Nous ne tenons pas compte non plus, dans une optique de mise en liquidation, des impôts différés et amputons donc la VANE de 0,68 usd supplémentaire. 

Mis à part les immeubles, nous décidons de ne pas tenir compte des autres actifs fixes : l’essentiel consiste en aménagements des locaux loués, aménagement qui ne « vaudraient plus tripette » en cas de liquidation.

Malgré son activité de financement complexe, la société n’a que très peu d’engagement hors bilan : la société indique bien une estimation du coût futur des garanties octroyées sur les produits vendus et, depuis le 30/04, les dettes portant sur les  créances qui ont été titrisées apparaissent bien au passif.  On a donc une bonne idée de l’importance du risque sur l’ensemble des créances et des engagements de la société sur les créances qui ont été cédées.  Nous notons tout de même les loyers à payer sur les baux restant à courir qui représentent tout de même 6,82 euros.  Nous décidons de considérer qu’en cas de mise en liquidation, Conn’s devrait s’acquitter de 75 % de ce montant soit 5,12 usd.

Compte tenu de ce qui précède, nous établissons donc la VMLV de Conn’s à 4,18 usd, soit un peu en dessous de notre coût éventuel d’achat.

 

IV.             La Valeur de la Capacité Bénéficiaire (VCB)

Un rappel technique de cette notion ici et ici

Conn’s est active dans un secteur très concurrentiel et ne semble pas présenter une taille suffisante pour se construire un solide avantage compétitif.

Son point fort nous semble être le fait qu’elle soit capable de proposer du crédit à ses clients et notamment aux moins solvables tout en présentant un historique de recouvrement très honorable malgré les risques apparents qui ont été pris. L’avantage est mince, nous en convenons, mais il témoigne néanmoins d’un certain savoir-faire.

Contrairement aux autres sociétés que nous évaluons, nous décidons de déterminer la VCB de Conn’s non pas en fonction de son résultat d’exploitation mais bien de son résultat net : en effet, une bonne partie de ses recettes proviennent des intérêts encaissés sur les financements octroyés, financements qui ont pu être réalisé au prix d’un endettement financier certain. Il  nous semble donc important de tenir compte des charges de dettes dans notre évaluation.

Au cours des 5 derniers exercices, la société a réalisé un résultat net moyen de 1,38 usd par action. Nous pensons qu’il sera difficile de réitérer dans le futur une telle rentabilité notamment en raison du resserrement du crédit aux US et probablement aussi d’un moins grand appétit à consommer des ménages. Nous tablons donc sur un résultat moyen amputé de 25 % pour les années à venir, soit 1,04 usd. Nous actualisons ce montant à 12 % et obtenons une VCB de 8,67 usd.

 

 

V.               Conclusions

A notre coût hypothétique d’achat de 4,4 usd, nous obtiendrions une marge de sécurité de :

         60 % sur la VANN

         62 % sur la VANE

         49 % sur la VCB

Comme quelques autres sociétés tirant une partie de leurs revenus d’activités de financement (par exemple Blue Green que nous détenons en portefeuille), la société nous semble fortement sous-évaluée comme si le marché anticipait des pertes pour 10 ou 20 % des prêts octroyés. Pour notre part, ces perspectives nous semblent particulièrement pessimistes et nous avons le sentiment qu’en achetant  Conn’s, nous disposons justement d’un important collatéral sous forme de créances diverses et variées en garantie de notre investissement.

.

AC Moore : un acquéreur qui ne fait pas une fleur aux actionnaires !

Nous revenons, ami(e) lecteur(trice), sur une de nos plus vieilles participations. Il s’agit d’AC Moore achetée lors de la création de notre portefeuille en novembre 2008

Cette société commercialise des produits liés au bricolage pour enfants, à la couture, au crochet, à l’artisanat alimentaire, bijoux, perles pour enfants, voir aux décors personnalisés pour la maison. C’est également un important fleuriste, proposant aussi des produits liés à l’art floral.
A l’heure actuelle, la valeur de son actif tangible net de dettes (VANT) s’élève à 5,59 usd par action.  A notre cours d’achat de 0,94 usd, nous pensions avoir, non seulement une belle marge de sécurité en cas de « coup dur » mais aussi un joli potentiel de hausse.

En février 2011, l’action cotait à 2,85 usd et le conseil d’administration annonçait qu’il étudiait la possibilité de vendre la société.  Déjà, nous pouvions nous lécher les babines dans l’espoir de voir notre portefeuille réaliser son xe bagger.

Hélas, le 4 octobre, la direction, triomphante,  annonçait avoir décidé de vendre la société au groupe S’Bar, un gros du secteur et ce, pour  un prix de 1,60 usd par action, soit une prime de 68 % par rapport au dernier cours mais… 3 fois moins que sa VANT !

Ce qui nous interpelle dans cette opération, c’est le fait que, le 13 juillet, l’action cotait encore à 2,39 usd. Une OPA à un prix inférieur au cours d’il y a trois mois sans qu’il n’y ait eu, entretemps,  une destruction de valeur massive a de quoi nous laisser songeurs. La chute du cours de 60 % depuis cette date nous interpelle également (sur la même période, le Russell 2000 – un indice de small caps US – ne perdait que 18 %) tout comme le fait que le prix de vente s’établit 44 % plus bas que celui auquel cotait l’action au moment où l’intention de vendre était annoncée.

Quoi ? On vend notre bien pour une bouchée de pain ? Un peu comme le ferait le CA d’une banque exsangue obligée de faire appel à la générosité des pouvoirs publics pour sauver sa peau ? Sauf que AC Moore n’est pas exsangue… Loin de là.

D’ailleurs, trois cabinets d’avocats ne s’y sont pas trompés et comptent engager des poursuites contre le conseil d’administration de la société.  

Pour l’heure, nous étudions encore pour quelle choix nous allons opter : apporter nos titres à l’offre avec l’amer sentiment de nous faire « entuber » même si nous réalisons une plus-value en dollars d’environ +70 % sur cette ligne ou conserver nos titres et participer aux poursuites qui pourraient bien être lancées dans l’espoir d’obtenir un « petit quelque chose » en plus.

Quoi qu’il en soit, nous vous tiendrons évidemment au courant des rebondissements de cette affaire dans laquelle nous avons la nette impression que tout n’est pas très « clean ».