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Chris Browne (2) : Un calcul relativement simple mais qui exigeait un travail laborieux

Nous poursuivons ici, après un petit portrait de famille attachant, notre « exploration » du livre de Chris Browne.

Page 120 :

« A mes débuts dans le monde de l’investissement…….Je devais étudier  le répertoire des entreprises de « Standard & Poor’s » (Standard & Poor’s  directory of Corporation) page par page et analyser leur actif net courant par action, l’une des mesures dans la valeur que privilégiait Ben Graham. Il commençait par s’intéresser aux actifs courants dans le bilan de la société : toutes les liquidités, les stocks et les créances recouvrables des clients, soit les actifs dont il estimait qu’ils pouvaient être vendus relativement rapidement. Puis il déduisait de ces actifs courants tout ce que devait la société. Il divisait le solde restant par le nombre d’actions en circulation pour déterminer l’actif net courant par action. Si le titre s’échangeait à deux tiers ou moins de l’actif net courant, il l’achetait. »

Commentaire : Nous vous avons déjà expliqué à maintes reprises, le travail de recherche lié aux daubasses, mais le voir écrit noir sur blanc, une nouvelle fois  de la plume de Chris Brown, nous amène à formuler quelques réflexions supplémentaires.

 

Investir en daubasses : un avantage concurrentiel certain

Il semblerait que depuis plus de 60 ans, les investisseurs dans la valeur, non seulement appliquent toujours le même calcul mais doivent toujours et encore affronter une somme de travail assez laborieux … et nous nous en réjouissons car, finalement, ce dur labeur constitue un peu notre « barrière contre la concurrence » à nous, les « value investors ».

C’est vrai que les bases de données avec l’avènement d’internet, ont remplacé avantageusement le support papier car il vous propose une sélection de sociétés selon des critères et ratios choisis par l’investisseur.  C’est un pas énorme en avant et qui diminue en partie la somme de travail à fournir. Chris Brown l’évoque également quelques pages plus loin.

Par contre aucune base de données n’est encore capable aujourd’hui de vous proposer quelques calculs plus précis avec un haut degré de fiabilité.  Ce qui vous oblige finalement à ouvrir les rapports annuels pour dresser une liste correcte.

A ce jour et avec toute nos expériences et discussions réunies, nous n’avons jamais entendu dire que les maisons réputées pour leurs analyses employant des équipes à la fois diplômées et  chevronnées et fournissant la majorité des Zinzins ( pour les Z’ investisseurs Z’institutionels ) comme Meryl Lynch ou Bloomberg, proposaient des rapport détaillés sur des sociétés que nous cataloguerions « daubasses ».

Et de notre point de vue, ce n’est pas qu’ils n’en seraient pas capables mais plutôt parce que cela ne correspond pas à la demande de leurs clients. En d’autres mots, la grande majorité des investisseurs professionnels ne sont pas intéressés par des sociétés très bons marchés qui ont des problèmes d’avenir. C’est simple la « daubasse » n’intéresse pas beaucoup de monde quand elle est proposée par Mister Market à un prix de daubasse …

Nous pouvons par contre vous certifier, en tant que témoins directs, que tous les analystes et les investisseurs sont extrêmement nombreux à reconsidérer leur jugement dès qu’une « daubasse » voit son court multiplier par 4 ou 5…

En moins de quelques mois le statut d’une telle société peut passer de « daubasse-infâme-à-ignorer-pendant-au-moins-la-prochaine-décennie » au statut de small cap de l’année + 600% avec un avenir radieux et un vent puissant dans le dos.

Ce qui est le plus étonnant, c’est qu’à ce stade d’avenir radieux jugé à l’unanimité de l’unanimité par monsieur Marché, il n’y a parfois pas le moindre profit comme les années précédentes, il y a parfois juste des pertes trimestrielles moins importantes ou un événement qui fait penser au marché que cette fois ça y est : c’est la timbale. Et que le raté de 600% au départ, ne sera que pacotille en rapport au futur radieux.

L’avantage de l’investisseur intéressé par la « daubasse » cher lecteur, à ce stade de la réflexion, ne vous échappe certainement plus.  C’est bien évidemment que la grande majorité des investisseurs, tant professionnels qu’amateurs, n’ont pas le moindre intérêt pour une société sans avenir, même à très bon prix.  L’industrie de l’investissement a avant tout besoin de belles histoires et de grands fantasmes et aucun cas de sociétés ayant rejoint la zone crépusculaire des problèmes en tout genres.

En plus et pour terminer, nous ne pensons pas que cela fait très sérieux dans le monde de l’investissement qui reste quand même d’une rare superficialité, d’expliquer que 85% de son portefeuille est constitué de sociétés qui n’ont pas affiché le moindre profit depuis deux ou trois ans et qui fabriquent des produits qui ne se vendent presque plus, que la direction a été remplacée récemment ou a englouti les liquidités de la société accumulées depuis 3 ans dans des produits structurés dont la valeur reste approximative !

Même à notre niveau « goutte d’eau », nous avons déjà surpris, au détour d’un forum, quelques échanges  sur le sérieux de notre démarche.

 

Conclusion

Nous pensons en conclusion que ce crash que nous avons tous vécu en 2008, restera, dans notre vie d’investisseur la leçon exemplaire. Car sans ce crash, nous n’aurions jamais pris conscience de manière aussi aigue, car douloureuse que le prix payé, pour une affaire est d’une importance capitale, que l’avenir radieux d’une société peut s’avérer catastrophique, si cet avenir n’est pas construit sur une base solide et que les sociétés même entrées dans des zones crépusculaires, peuvent garder une valeur sous certaines conditions. Car le lire est une chose, le vivre en est une autre.

Nous verrons dans un prochain épisode quels sont les critères qu’exige Chris Browne d’une société pour qu’elle devienne une cible d’investissement potentielle.

 

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Chris Browne (1) « Dites moi qui vous fréquentez, je vous dirai qui vous êtes »

Chris Browne est bien plus que le responsable de gestion des fond communs de placement de la société américaine Tweedy Browne, c’est d’après Martin Withman, l’un des rare gérant dans le monde de l’investissement dans la valeur. Rien de moins !

Si nous nous sommes intéressés à lui, c’est surtout par son côté « chasseur impénitent de bonnes affaires » sur les rayons des épiceries, ou encore grands amateur de soldes dans les petites boutiques.

Ayant lu récemment son « petit livre », « Le petit livre pour investir à bon prix : Une formule éprouvée pour battre le marché en investissant dans la valeur » et ayant trouvé assez savoureux plusieurs passages concernant sa vie et sa manière d’investir, nous avons décidé de vous les faire partager ici sur notre blog, agrémentés de quelques commentaires.

 

Première épisode : « Dites moi qui vous fréquentez, je vous dirai qui vous êtes »

Page 28 : « La société pour laquelle je travaille depuis 1969 fut créée en 1920 par Forest Berwind Tweedy (également connu sous le nom de Bill Tweedy). Bill Tweedy était un personnage excentrique qui ressemblait davantage à l’acteur Wilfred Brimley qu’au courtier fringant des années 1920. Lorsqu’il démarra son activité, il cherchait une niche avec peu de concurrence. Les actions peu traitées la lui fournirent. Généralement un seul actionnaire ou un petit groupe d’actionnaire détenait la majorité des parts de l’entreprise. Cependant, dans de nombreux cas, il existait des actionnaires minoritaires qui n’avaient pas d’autre alternative que de revendre leur part à la société. Bill Tweedy y vit une opportunité. Il essaya de mettre en relation les acheteurs et les vendeurs minoritaires. Pour ce faire il chercha des actionnaires à l’occasion des assemblées annuelles. Il envoya des cartes postales leur demandant s’ils souhaitaient acheter ou vendre certaines de leur parts, et ainsi devint spécialiste des sociétés au nombre limité d’actionnaires et dont les titres ne bénéficiaient pas d’un marché actif.

 

Tweedy avait un simple bureau à cylindre dans un espace exigu sur Wall Street. Il n’avait ni assistant, ni secrétaire. Et il travailla ainsi pendant 25 ans. En 1945 mon père Howard Browne et l’un de ces amis, Joe Reilly, démissionnèrent de leurs emplois respectifs et s’engagèrent en partenariat avec Tweedy. Tweedy, Browne and Reilly était né. Les trois voulaient continuer à créer des marchés pour les titres non cotés en bourse, détenus par un nombre limité d’actionnaires et qui s’échangeaient sous leur prix de marché.

 

Les activités de Tweedy attirèrent l’attention de Benjamin Graham au début des années 1930 qui le fit travailler dans des activités de courtage pour  lui. A la création de Tweedy Browne and Reilly en 1945, les partenaires ouvrirent un bureau au 52 Wall Street. Ils pensaient que la proximité leur apporterait une plus grande part de l’activité de Graham.

 

La société peina des années 1940 aux années 1950, mais elle survécu. Il y avait suffisamment d’investisseurs hors norme qui préféraient les actions bon marché non cotées en bourse pour permettre à la firme de survivre. En 1955, Walter Schloss, qui avait travaillé pour Graham avant de le quitter en 1954 pour lancer son propre fond d’investissement s’installa dans les locaux de Tweedy Browne and Reilly, en fait dans un couloir aménagé en bureau, près du distributeur d’eau réfrigérée et du porte manteau … Schloss pratiquait l’approche pure de l’investissement dans la valeur de Graham et établit un record de 49 années consécutives de performance et un taux de rendement annualisé de 20%. Il conserve à ce jour un bureau dans ma société, bien qu’il soit partit à la retraite il y a quelques années, lorsque veuf , il se remaria à l’âge de 87 ans (Ne vous inquiétez pas pour l’avenir de Walter. Ses deux parents ont vécu au-delà de 100 ans).

 

Walter présenta deux personnes essentielles à la société. En 1957, Bill Tweedy partit à la retraite tout comme Ben Graham. Mon père et Joe Reilly préféraient être trois partenaires. Walter les présenta à Tom Knapp qui avait étudié à la Columbia Business School lorsque Graham, pour qui il travaillait y enseignait. Il s’empressa de devenir le troisième partenaire de la firme dès qu’il réalisa que de nombreux naïfs offraient leurs actions à Tweedy Brown à de faibles niveaux de valorisation. Son idée était de transformer la société en une entreprise de gestion de fonds.

 

Walter présenta ensuite un autre associé de la société de Graham : Warren Buffett. La tradition financière aurait voulu que Graham offre à Buffett de reprendre son fond, mais la femme de Buffett souhaitait retourner à Omaha dans le Nebraska. Alors le pauvre Buffett avait tout à refaire. En 1959, Walter Schloss présenta Buffett à mon père. Naquit alors une relation basée sur la confiance et qui dura 10 ans, jusqu’à ce que Buffett mette un terme à son fond en 1969. Mon père acheta la majorité des parts de Berkshire Hathaway que Buffett possède aujourd’hui.

Tweedy Brown avait l’avantage d’être le courtier  de trois des plus grands investisseurs de l’histoire : Benjamin Graham, Walter Schloss, Warren Buffett. Il n’est pas surprenant que nous soyons adeptes de l’investissement dans la valeur … »

 

Commentaire : Nous avons vraiment trouvé  savoureux le portrait de famille esquissé dans cette introduction  par Chris Brown,  pour nous expliquer d’où il vient et finalement quel investisseur il est.

Même s’il s’agit plus d’anecdotes que d’investissement à proprement parler. Nous n’oublierons toutefois pas dans le pur anecdotique l’information sur la vigueur des investisseurs dans la valeur jusqu’à un âge avancé : Big Walt se mariant à 87 ans, qui dit mieux !

Dans l’information ayant rapport à l’investissement, nous apprenons que Ben Graham, s’intéressait au non coté, voir aux sociétés cotées faisant l’objet de peu d’échanges.  Cela sent évidemment le Pink Sheet, OTC et autre compartiment B voir C d’aujourd’hui …

Ce n’est pas la première fois que nous entendons ce discours : notre ami Philip « l’  Entrepreneur boursier » l’avait déjà évoqué dans un article sur son blog, au sujet de Buffett.  Chris Browne nous le confirme pour Graham et, par extension, nous ne pensons pas faire une erreur en pensant que Big Walt a certainement dû en profiter puisqu’il « zieutait » les clients de Tweedy Browne de son bureau du fond du couloir.

Ces « Pink Sheet », voir ces actions peu échangées qui ne plaisent pas à bon nombre d’investisseurs d’aujourd’hui, nous semblent de plus en plus un terrain de chasse obligé pour faire la différence. Cela remet même, de notre point de vue, légèrement en cause le fait pour un investisseur particulier, de devoir absolument investir sur des Big Cap. A moins d’avoir un patrimoine excédent plusieurs dizaine de millions d’Euro.

Et nous pensons aussi que la chasse obligée sur de petites sociétés en termes de capitalisation sur des marchés « obscurs » où les échanges sont plus rares est presque une chasse gardée, car la majorité des fonds de placement collectifs en sont exclus.

C’est une phrase de la fin de cette introduction qui nous a le plus interpellé, quand Chris Browne explique que Tom Knapp, engagé et élève de Graham à Columbia, « s’empressa de devenir le troisième partenaire de la firme dès qu’il réalisa que de nombreux naïfs offraient leurs actions à Tweedy Brown à de faibles niveaux de valorisation. »

Nous nous demandons aujourd’hui, presque 70 ans plus tard, quel type d’investisseur ont bien pu nous vendre une quantité aussi impressionnante de sociétés qui dans les 12 mois ont été multipliées par 3 – 4 – 12 et même 25 ( comme nous en informait dernièrement un de nos abonnés au sujet de Telestone que nous avons revendu, quant à nous,  après un malheureux et modeste quadruplement du cours)

Nous pensons 70 ans plus tard, malgré l’avènement de la communication et des échanges via Internet, que certains investisseurs appartiennent à la même école que celle décrite par Chris Browne à savoir l’école des « naïfs ».  Par contre nous pensons qu’ aujourd’hui, ces « naïfs » ne constituent qu’ une minorité d’investisseurs car il nous est difficile d’imaginer un  investisseur qui n’aurait pas lu le moindre journal financier, le moindre bouquin sur l’investissement, ou n’aurait pas participé à un forum de discussion financier voir lu quelques échanges comme cela à  du être le cas 50-60 ans en arrière.

De notre point de vue, c’est aux spéculateurs que nous devons le fait d’avoir pu acheter autant d’aubaines, d’avoir pu constituer une liste de 200 sociétés cotées sous leur valeur d’actif net-net. Bien entendu aidés par Mr Market.

 

En conclusion a cette question, nous pensons que le meilleur ami des investisseurs dans la valeur et des chasseurs de « Daubasses » en particulier  reste le spéculateur, cher lecteur. Car finalement peut-on imaginer un spéculateur sans un fond de naïveté plus ou moins important ?

Pour clôturer cette épisode, nous remarquons enfin que l’excentricité revient souvent comme un file conducteur dans ces histoires d’investisseurs dans la valeur, de Marty Withman se baladant en chaussettes trouées avec une mallette en plastique sur la 42 ième avenue, en passant pas Walter Schloss, Bill Tweedy ou Warren Buffett .  Ceci nous amène à formuler une dernière question. Peut-on être un investisseur dans la valeur sans une dose d ‘excentricité, qui peut-être bien entendu une manière différente de voir les choses ?

 

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Les 16 commandements de l’investisseur "deep value" selon Walter Schloss 2/2

Comme promis, nous vous proposons la deuxième partie des principes d’investissement de Walter Schloss, accompagnés de notre interprétation de ces principes.

Walter Schloss en conversion avec Bill Ruane, fondateur du fond Sequoia et un des investisseurs de « Graham-and-Doddsville ».

 

9. Ne vous précipitez pas pour vendre. Si une action atteint un cours que vous considérez comme correct, alors vous pouvez vendre mais souvent, les gens vendent une action pour la simple raison qu’elle a monté de, disons, 50%, afin de prendre leur bénéfice. Avant de vendre, essayez de réévaluer l’entreprise à nouveau afin d’apprécier le cours de l’action relativement à la valeur des fonds propres. Prenez en compte le niveau général de la Bourse. Les rendements sur dividende sont-ils bas et les Price Earnings élevés ? La Bourse est-elle historiquement haute ? Les investisseurs sont-ils très optimistes ? Etc. 

« C’est un point fondamental qu’évoque ici Walter Schloss et qui est d’autant plus important qu’il est d’actualité, les marchés ayant en général repris 50% depuis leur plus bas à l’heure où nous écrivons ce texte. On y lit un peu partout qu’il faut prendre ses bénéfices sur certaine valeur voir que l’on a déjà pris ces bénéfices à 25-30%.

Certains investisseurs se félicitent d’avoir sécurisé, d’autres regrettent déjà d’avoir loupé les 20% supplémentaires.

 

10. L’achat d’une action se fait idéalement lorsque son cours avoisine son niveau plancher sur quelques années. Une action peut monter à 125 et redescendre à 60 : cela n’en fait pas nécessairement une bonne affaire si 3 ans auparavant, cette action se vendait à 20.    

« Ce point 10 nous a toujours semblé étonnant car il a un petit côté « analyse technique ». Que veut nous transmettre Walter Schloss avec cette idée ?

 

11. Essayez d’acheter des actifs avec décote plutôt que des bénéfices. Les bénéfices peuvent changer significativement sur un laps de temps très court. Les actifs, eux, sont plus stables. On doit en connaître nettement plus sur une entreprise si on base sa décision d’achat sur les bénéfices.   

« Si nous avions du choisir le point résumant le mieux les principes d’investissement de Walter Schloss, c’est ce point 11 que nous aurions choisi. Nous n’avons pas de commentaire à faire sur ce point qui nous semble clair et très explicite. »

 

12. Ecoutez les suggestions des personnes que vous respectez. Cela ne signifie nullement que vous devez les suivre. Rappelez-vous qu’il s’agit de votre argent et qu’il est généralement plus difficile de garder son argent que d’en faire. Une fois que vous avez perdu une grosse quantité d’argent, il est très difficile de la retrouver.   

« Nous pensons que ce point 12 est principalement un appel à la prudence, tout en restant à l’écoute des investisseurs que l’on apprécie et respecte. »

Un « chasseur de Daubasses », voir d’occasions basées sur la valeur, ne devrait pas être tiraillé par ce problème car déterminer la valeur, c’est fixer un prix d’achat incluant une marge de sécurité mais également un prix de vente qui représente correctement la valeur de la société.

Si ce prix de vente est fixé à 200% du prix d’achat, ce qui n’est pas rare dans le compartiment « net-net », nous ne vendrons pas à +90% de ce prix d’achat, pas non plus à +190%, mais bien à +200%.

Tous ceux qui nous lisent sur ce blog savent par exemple que dans notre compartiment « net-net », nous avons fixé notre prix d’achat lorsque le cours de l’action vaut 70% de sa VANN et que notre prix de vente est fixé à la Valeur de l’Actif Tangible Net. Nous avons d’autres critères pour le compartiment Net – Estate et VCB (Valeur de la Capacité Bénéficiaire).

Il est bien sûr évident que ces critères sont revus périodiquement avec les rapports financiers modifiant les seuils d’achat ou de vente.

Walter Schloss vous propose aussi, d’essayer une évaluation plus globale des marchés avec les rendements des dividendes, les PER, les niveaux historiques des indices, voir le degré d’optimisme des investisseurs. C’est évidemment un « plus » pour prendre la température ambiante, après avoir réévalué une nouvelle fois la société. »

Nous pensons tout d’abord que le chasseur de « Daubasses » qui doit inévitablement rechercher les exagérations de « massacre » sur le marché doit, en priorité, faire une sélection de société ayant perdu rapidement 40% voir plus. Mais comme nous l’explique Walter Schloss avec son exemple, si une exagération a eu lieu à la hausse une chute de 40% et plus ne signifie pas grand chose si le cours est 2 voir 3 fois supérieur par rapport à celui de quelques années auparavant.

Par contre si le cours enregistre un plus bas à 5 ans par exemple, cela peut éventuellement devenir intéressant. Un graphique des cours vous offre une lecture rapide. Nous considérons ce point 10 comme une idée de première sélection. »

 

13. Essayez de ne pas laisser vos émotions interférer dans votre jugement. La peur et la cupidité sont probablement les pires émotions à avoir en relation avec l’achat ou la vente d’actions.  

« Nous pensons qu’avec nos suggestions du point 8 et donc une feuille de route bien détaillée et précise sur de nombreux points, vous êtes suffisamment en mesure de vous protéger contre vos émotions pour ne pas qu’elles interfèrent dans votre jugement quand il est question d’investissement. »

 

14. Gardez à l’esprit le mécanisme des rendements composés. Par exemple, si vous faites du 12% par an et réinvestissez vos gains, vous doublerez votre capital en 6 ans, hors impôts. Cette règle des 72 (dans ce cas, 12*6) vous indique le nombre d’années nécessaires pour doubler votre argent.  

« En mettant en avant la puissance de l’intérêt composé, Big Walt nous recommande de réinvestir les profits. Cela peut sembler évident. Si nous approuvons pleinement cette philosophie dans le cadre de la constitution d’un patrimoine, nous n’oublions pas, en bons épicuriens, que la finalité de ce patrimoine sera tout de même à un moment ou à un autre d’en profiter ou d’en faire profiter nos proches. »

 

15. Préférez les actions aux obligations. Les obligations limiteront vos gains et l’inflation réduira votre pouvoir d’achat.  

« Nous pensons également qu’il faut être très sélectif sur les obligations et n’investir que sur les belles occasions après une analyse du bilan. »

 

16. Ne vous endettez pas à la légère pour achetez des actions : l’endettement peut se retourner contre vous.   

« Ce dernier point est un principe partagé par tout ceux qui se considèrent comme les élèves de Ben Graham aussi différents que soient leurs principes d’investissement dans la valeur.

L’endettement personnel comme dans ce seizième point ou dans le bilan d’une société peut mener à la catastrophe.

Nous nous sommes rendu compte très tôt avec notre idée d’investir dans les « Daubasses » que l’endettement était essentiel et que les sociétés peu endettées avaient un atout supplémentaire pour résister par très gros temps.

Nous avons souhaité partager avec vous, cher lecteur, ces 16 principes d’investissement de Walter Schloss parce qu’ils consituent le fil rouge de la philosophie d’investissement que nous tentons d’appliquer sur ce blog. La lecture de ces principes nous a permis, il nous semble, de devenir de meilleurs investisseurs. Nous espérons que ce sera aussi votre cas.

 

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>> Walter Schloss (8/9) : 28/08/1916 – 19/02/2012

Les 16 commandements de l’investisseur "deep value" selon Walter Schloss 1/2

Tous nos lecteurs connaissent déjà notre admiration pour celui que nous considérons comme le plus grand chasseur de « Daubasses » de tout les temps : Walter Schloss.

Ce sacré « Big Walt » est un personnage hors du commun en raison de la première impression que ses 2 mètres dégagent, « avec son air hautin», comme dirait Buffett mais aussi en raison de l’endroit où il a passé sa vie d’investisseur, « un bureau se composant d’une pièce sous louée à Tweedy Brown» et également en raison de ses outils d’informations financières « un abonnement à Value Line » qui lui ont quand même permis en 45 ans de dégager 15.3% de rendement annualisé. Nous admirons également le respect hors du commun qu’il témoigne à ses clients, respect que nous aimerions voir plus souvent copié par les gestionnaires de fonds actuels : Walter Schloss ne percevait jamais de commission, il se rétribuait seulement sur les performances de son fond et retournait aussi chaque année, les gains à ses clients. En 45 ans, les performances de son fond ont été 7 fois négatives, contre 11 fois pour les S&P 500 !

Au-delà de notre admiration pour cet investisseur décalé, nous considérons aussi que c’est sans doute le seul élève de Ben Graham à avoir appliqué les principes du maître sans y déroger, ce qui nous fait penser que ces principes dans une vingtaine d’années seront âgés d’un siècle.

Connaissez-vous, en finance, beaucoup de théories qui ont tenu plus d’une, voir deux décennies, ou qui peuvent encore être appliquées telles quel pour aborder un problème 80 ans plus tard ? Et ce, après une guerre mondiale, des conflits innombrables, de multiples crises économiques et monétaires, des avancées fulgurantes transformant radicalement le monde d’hier ?

Nous pensons qu’il est intéressant de vous présenter les 16 principes d’investissement que Walter Schloss a appliqué durant sa vie d’investisseur. Et ce, même si nous sommes conscients qu’il n’y a rien de fondamentalement révolutionnaire puisque que nous venons de dire que « Big Walt » est l’élève le plus fidèle aux théories de Benjamin Graham. Cependant, quelques points nous semblent toutefois assez originaux pour nous laisser penser qu’ils ajoutent un petit plus et qu’ils peuvent aider un investisseur dans la valeur désireux de devenir meilleur.

Nous nous permettons enfin de faire, en toute modestie, un petit commentaire « en italique » sous chacun de ces principes pour vous en proposer notre lecture, en souligner l’importance et ses difficultés ou évidences. Ce qui finalement nous permet aussi de comprendre où nous nous situons, le chemin qu’il nous reste à parcourir, les points qu’il faut retravailler, et ceux qu’il ne faut pas perdre de vue quoi qu’il se passe sur les marchés !

Dans cet article, nous aborderons les 8 premiers principes de notre idole. Les voici :

 

1. Le cours de l’action est le facteur le plus important à utiliser en relation avec la valeur de cette action.

« Le premier principe peut paraître anodin, banal, sans la moindre utilité et pourtant en seulement 21 mots Walter Schloss, explique de manière lumineuse la seule utilité du cours de l’action d’une société cotée en bourse. »

 

2. Essayez d’établir la valeur de l’entreprise. Gardez à l’esprit qu’une action représente une part d’une entreprise et pas simplement un morceau de papier.

« Le deuxième principe commence par « Essayez ». Il y a pour nous, dans ce mot, un mélange conjugué de modestie et d’obligation de travail.

Essayer d’établir la valeur d’une entreprise, ce n’est pas forcément facile, ce n’est pas forcément un chiffre au centième, c’est forcément des erreurs car de quelques manières que vous retourniez le problème une entreprise est une entité complexe. Humaine, en premier lieu, créative, en second lieu et à différent niveaux et enfin qui doit affronter en permanence les nombreuses lois d’un marché en perpétuel mouvement.

On peut donc vraiment avoir la certitude qu’un billet de loto est un morceau de papier mais en aucun cas les certitudes ne peuvent apparaître quand on essaie de déterminer la valeur d’une société…. »

 

3. Utilisez la valeur comptable des fonds propres comme point de départ pour tenter d’établir la valeur de l’entreprise. Et assurez-vous que l’endettement est inférieur à 100% des fonds propres.

« Voilà le terrain de chasse délimité, en deux phrases et aussi d’une certaine manière la fin de tout rêve quand il s’agit d’investissement dans la valeur. Les fonds propres d’une entreprise c’est la seule richesse des actionnaires, à un moment précis, le plus proche du dernier rapport financier, « No futur »… ! Et ensuite moins il y a d’endettement, moins il y aura de futures surprises … mauvaises bien entendu….. !

Nous pensons aussi que ces deux principes de sélection fondent les exigences d’un investisseur dans la valeur…..C’est basique une nouvelle fois, mais s’y tenir demande à notre avis une discipline au-dessus de la moyenne. »

 

4. Soyez patients. Les actions ne grimpent pas immédiatement.

« Quand on achète une action massacrée par le marché, il y a toujours une bonne raison. Cela, aucun investisseur dans la valeur ne peut le nier. Ce que recherche l’investisseur « value », c’est finalement les exagérations du marché et c’est donc dans l’exagération d’un massacre que l’on peut se créer une marge de sécurité par rapport à la valeur de la société. Il est évident que les problèmes rencontrés par la société peuvent mettre un certain temps à se résoudre. L’appel à la patience de Walter Schloss est à notre avis un « outil » psychologique que tout investisseur doit acquérir. »

 

5. N’achetez pas sur la foi d’informations spéculatives. Laissez les professionnels jouer à court terme, s’ils le peuvent. Ne vendez pas sur de mauvaises nouvelles.

« Autre « outil » psychologique à acquérir par l’investisseur dans la valeur que ce point 5 : se concentrer sur l’information qui a un rapport direct avec la société.

À l’achat, les informations spéculatives, c’est un peu comme croire au père Noël, vous prenez la chance de recevoir quelques bonbons dans la botte que vous avez mis devant la cheminée mais aussi le risque de découvrir que le père Noël, c’est juste une belle histoire et qu’il n’existe pas réellement.

Il y a donc d’emblée un déséquilibre évident entre ce que vous risquez de gagner et ce que vous risquez de perdre.

Ne pas vendre sur des mauvaises nouvelles, dans l’idée de Walter Schloss, selon notre lecture, c’est que si vous vous basez sur les actifs d’une société pour en acheter quelques parts, que vous possédez une marge de sécurité suffisante sur ces actifs, une mauvaise nouvelle comme, par exemple, une baisse du chiffre d’affaires, la perte d’un contrat ou des profits qui ont chuté de 30% supplémentaires, n’impacte pas nécessairement les actifs sur lesquels vous vous êtes basés pour acheter cette société. A partir de là, il n’y a pas à proprement parler de mauvaises nouvelles concernant les éléments précis qui vous ont amené à acheter cette société, pourquoi vendre alors ? »

 

6. N’ayez pas peur d’avoir raison contre les autres mais assurez-vous que votre jugement est correct. Vous ne pourrez jamais en être certain à 100% mais tentez de trouver les faiblesses de votre raisonnement.

« Il y a deux idées dans ce point 6 qui sont complémentaires, mais qu’il nous semble utile de dissocier car elles nous paraissent complexes.

Tout d’abord, « avoir raison contre les autres » est une idée qui flatte toujours l’ego d’un être humain et plus encore dans l’investissement . C’est d’ailleurs pour cette raison que l’on trouve finalement dans ce monde « étrange » autant de « gourous » qui ont l’une ou l’autre « grosse » fois raison contre tout le monde sur un incident macro économique par exemple. Nous pensons qu’avoir raison contre les autres a du sens à la seule condition d’avoir eu comme fondement un raisonnement correct sur la valeur d’une société.

Pourquoi ? Tout simplement et premièrement parce que personne n’a raison contre les autres au départ d’un investissement : le point de départ étant un raisonnement correcte que ne pose pas nécessairement les autres investisseurs comme vous le posez.

Deuxièmement, il est possible, si vous partez d’un raisonnement correct basé sur des éléments tangibles de répéter ce raisonnement dans des cas de figures différents. Et c’est évidemment la chose la plus importante, le « pouvoir répéter » car il est impératif de parvenir à poser un raisonnement correct qui vous permet d’avoir raison contre les autres au moins 6 fois sur 10 pour espérer vous en sortir. On comprend alors aisément qu’avoir raison une ou deux fois sur une décennie est largement insuffisant.

La deuxième proposition de Walter Schloss est centrée sur le raisonnement et comme nous vous le disions un peu plus haut, au départ d’un investissement, il est impossible d’avoir raison contre les autres, impossible d’avoir des certitudes, du 100% certain.

Pourquoi ? Parce que dans toute analyse, il y a un cheminement qui repose sur des faits et ensuite il y a des hypothèses basées sur ces faits qui se réaliseront ou pas dans le futur. Il est donc important de classer les hypothèses en catégories. La catégorie avec de très grandes probabilités de réalisation et la catégorie avec des probabilités moyennes de réalisation.

C’est évidemment dans cette deuxième catégorie que se trouve la faiblesse possible de votre raisonnement. Avoir une idée claire des faiblesses de votre raisonnement vous permet très rapidement, lors d’une information sur la société voire lors d’une publication de résultat, de faire un diagnostic précis et de prendre les décisions qui s’imposent. Sans avoir repéré les faiblesses de votre raisonnement, vous ne pouvez même pas à notre avis, juger que votre raisonnement est correct. »

 

7. Ayez le courage de vos convictions une fois votre décision prise.

« Nous ne pensons pas que Walter Schloss parle ici de convictions basées sur l’intuition, les ragots financiers ou autres convictions qui n’auraient pas de rapport avec un raisonnement correct que nous venons de voir dans le point précédent.

Il évoque, à notre avis, la conviction d’avoir posé un jugement correct et d’avoir le courage de présenter éventuellement ce raisonnement point par point. Il parle en fait de l’impératif d’acquérir un niveau suffisant de confiance en soi.

Sans un degré suffisant de confiance en soi, ce sera monsieur le marché qui vous dictera votre manière d’investir, en tout temps, soit acheter au plus haut en pensant que cela ira encore plus haut et vendre au plus bas toujours en pensant que cela ira encore plus bas, ce qui est,évidemment, l’inverse de se qu’il faut faire. »

 

8. Ayez une philosophie d’investissement et tâchez de ne pas y déroger.

« Tout comme vous, sans doute, nous jugeons ce point évident, mais également d’une extrême difficulté à mettre en pratique.

Nous pensons qu’une philosophie ou une stratégie d’investissement cela s’écrit d’abord sur un bout de papier ou une feuille « Word ».

Il est d’abord nécessaire de définir les limites à partir desquelles une société mérite d’être analysée. Nous parlons ici de limites chiffrées, précises, permettant de faire un premier tri.
Il s’agit ensuite de fixer tous les paramètres financiers que vous jugez incontournables pour qu’une société vous semble digne d’achat. De nouveau, il nous semble obligatoire que cela soit chiffré et donc précis.

Il nous semble également important d’écrire noir sur blanc les différents pièges dans lesquels il ne faut pas tomber et qui seront à chaque fois vérifiés. Cette liste est bien évidemment non exhaustive et peut aussi être appelée « liste de stupidités » chère à Charlie Munger. A partir de cette base écrite, solide car chiffrée, peuvent commencer d’autres investigations moins quantifiables.

Ce qui nous semble le plus difficile, c’est qu’il faut savoir attendre que les sociétés et leurs paramètres économiques entrent dans votre grille puis, ensuite, que le prix proposé par Mr Market vous convienne.

Deux éléments difficiles à trouver dans des cycles économiques ascendants ou dans des cas d’euphorie boursière. Vos critères vous paraîtront inévitablement trop exigeants et c’est à ce moment là, que vous aurez le plus grand désir de participer à la fête en assouplissant vos critères de sélection alors, qu’en réalité, vous ne devriez strictement rien faire d’autre qu’attendre que se présente à nouveau des occasions !

C’est humain, très humain même, mais pour l’investisseur dans la valeur dont nous parlons ici, c’est une erreur ! Nous en discutons souvent dans l ‘équipe des « Daubasses selon Benjamin Graham » pour nous préparer mentalement le mieux possible à rester spectateurs des marchés pendant un certain temps si les occasions venaient à manquer. Nous avançons parfois les possibilités à venir de n’être investis que sur quelques occasions et d’avoir 80% de liquidité voir plus placées sur un compte à terme.

D’ici quelques jours, nous vous proposerons, cher lecteur, les 8 autres principes d’investissement de Walter Schloss qui forment, avec ceux que nous venons d’exposer, les 16 commandements de l’investisseur « deep value ».

 

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