Analyse financière : les méthodes de valorisation des stocks

Le poste de « stock » est, selon nous, un poste très sensible pour « l’analyste » qu’il soit professionnel ou simplement, « du dimanche » comme vos humbles serviteurs. En effet, la comptabilisation d’un stock peut avoir une influence considérable, non seulement sur la valeur de l’actif de l’entreprise analysée mais aussi sur son résultat.

En effet, lorsque l’on calcule le résultat comptable d’une société, le changement de valeur du poste d’inventaire est pris en compte : lorsque le montant du stock augmente, on l’ajoute au bénéfice comptable, lorsqu’il diminue, on le soustrait du bénéfice comptable.

Nous vous avions déjà expliqué notamment dans cet article, la méthode que nous utilisions pour tenter de déterminer si la  valeur du stock reprise au bilan était rationnelle par rapport à sa « vraie » valeur commerciale.

Nous pensons aussi que, selon les règles d’évaluation utilisées par la direction, les stocks peuvent également être influencés fortement quant au montant qui déterminera ce poste du bilan.

En principe, quatre méthodes sont admises en comptabilité pour valoriser un inventaire.

 

1. La méthode FIFO (First In, First Out ou premier entré, premier sorti)

Cette méthode consiste à valoriser les sorties de stock au prix des premières unité entrées jusqu’à épuisement du lot correspondant, avant de passer au lot suivant..

Ainsi, une société achète 100 pièces d’un article à 3 euros la pièce et ensuite 300 pièces à 4 euros et 100 pièces à 4,50 euros. Elle vend 200 pièces de cet article.  Au cours de l’année, son inventaire variera de la façon suivante :

+ 100 pièces à 3 euros

>> valeur du stock : 100 X 3 = 300

+ 300 pièces à 4 euros

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) = 1 500

+ 100 pièces à 4,50 euros

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) + (100 X 4,50) = 1 950

– 200 pièces vendues

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) + (100 X 4,50) – (100 X 3) – (100 X 4) = 1 250

En réalité, FIFO travaille comme une bonne ménagère qui gère son réfrigérateur :  elle place ce qu’elle vient d’acheter à l’arrière du réfrigérateur afin de finir les denrées alimentaires plus ancienne avant qu’elles ne soient périmées.

Les principaux inconvénients de cette méthode sont de deux ordres.

D’une part d’ordre opérationnel pour la société : elle nécessite une identification, une gestion différenciée et la connaissance du coût unitaire de chaque lot. Et est donc assez lourde en terme de gestion.

D’autre part d’ordre financier : en période de forte inflation, elle surévalue le résultat d’exploitation, entraînant un risque de versement de dividendes non réels et le paiement d’impôts excessifs. Les coûts sont sous-estimés et l’enregistrement de l’inflation en retard entraîne une constatation tardive de la dégradation du résultat.

 

2. La méthode LIFO (Last In, First Out ou dernier entré, premier sorti)

Cette méthode consiste à valoriser les sorties de stock au prix des dernières unités entrées jusqu’à épuisement du lot correspondant, avant de passer au lot suivant..

Reprenons exactement la même société que ci-dessus qui, pour rappel, achète 100 pièces d’un article à 3 euros la pièce et ensuite 300 pièces à 4 euros et 100 pièces à 4,50 euros. Elle vend 200 pièces de cet article.  Au cours de l’année, son inventaire variera de la façon suivante :

+ 100 pièces à 3 euros

>> valeur du stock : 100 X 3 = 300

+ 300 pièces à 4 euros

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) = 1 500

+ 100 pièces à 4,50 euros

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) + (100 X 4,50) = 1 950

– 200 pièces vendues

>> valeur du stock : (100 X 3) + (300 X 4) + (100 X 4,50) – (100 X 4,50) – (100 X 4) = 1 100

L’intérêt de cette approche est qu’elle permet, surtout en période d’inflation, de répondre au principe de prudence dans la présentation des comptes : le stock final est sous-évalué et permet une baisse du résultat. Néanmoins, dans des secteurs où l’obsolescence peut être très rapide comme dans les « hight tech », cette méthode pourrait ne pas être adéquate  Elle présente aussi l’inconvénient, comme la méthode FIFO, de nécessiter une identification individuelle et une gestion différenciée et la connaissance du coût unitaire de chaque lot.

 

3. Le coût unitaire moyen pondéré (CUMP)

Cette méthode calcule le prix des articles en stock en moyennant leur prix d’achat, sans tenir compte des sorties de la période. Elle est rarement utilisée et nous semble peut utile, si ce n’est que la gestion est plus simple pour l’entreprise puisqu’elle ne doit pas individualiser les lots en stock.

Pour notre société « modèle », nous évaluerions la valeur du stock comme ceci :

(100 X 3) + (300 X 4) + (100 X 4,50) / 500 = 3,9 par pièce.

>> Valeur du stock fin de période : 3,9 X 300 = 1 170

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4. La valeur de remplacement (NIFO)

Cette méthode consiste à évaluer les sorties à leurs valeurs de remplacement. Pour valoriser les sorties et les existants en stocks, on retient donc par exemple, le prix de la dernière facture, le cour du jour…

On retient une valeur de remplacement qui est le coût théorique à engager au moment de la sortie pour reconstituer le stock.

Cette approche permet de connaître le coût de reconstitution du stock et  évite un trop grand nombre de calculs, ce qui simplifie le travail et les procédures au sein de l’entreprise.

Néanmoins, en période de forte inflation, elle pourrait, comme la méthode FIFO, surestimer le résultat et la valeur réel de l’actif.

Dans notre exemple ci-dessus, l’ensemble du stock sera donc valorisé à 4,50 euros, soit 300 X 4,50 = 1 350

Comme vous pouvez le constater, cher lecteur, en fonction de la méthode de valorisation utilisée, la valeur finale du stock peut être tout-à-fait différente. En résumé, pour un même inventaire, nous  avons obtenus les montants suivants :

  • FIFO : 1 250
  • LIFO : 1 100
  • CUMP : 1 170
  • NIFO : 1 350

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Conclusion

Vous voyez donc qu’il est très important de bien comprendre la méthode utilisée par la direction et son impact qui est non seulement important en ce qui concerne la valeur du stock reprise à l’actif du bilan mais aussi en ce qui concerne le résultat d’exploitation de la société analysée.

En effet, schématiquement, on calcule  le bénéfice d’exploitation d’une société sur base de la formule suivante :

Total des ventes – total des achats + valeur de l’inventaire en fin d’exercice – valeur de l’inventaire en début d’exercice

Ainsi, en fonction de la méthode de valorisation choisie pour les stocks, le résultat de l’entreprise peut être tout-à-fait différent.

Ce qui nous amène, cher lecteur, à attirer votre attention sur un éventuel changement de règle d’évaluation au sein d’une entreprise : une société qui choisit, d’une année à l’autre, de passer de la méthode LIFO à la méthode NIFO ne le fait-elle pas simplement pour améliorer artificiellement son résultat comptable ?

Une bonne approche pour vérifier la pertinence de la règle choisie par la direction serait, à notre avis, de vérifier que la méthode choisie par l’entreprise correspond à celle des autres entreprises d’un même secteur. Ainsi si toutes les sociétés d’un même secteur travaillent en LIFO, pourquoi telle entreprise en particulier utiliserait-elle le FIFO ou le NIFO ?

<< Glossaire français-anglais des termes comptables les plus répandus

>> Le retraitement de la valeur des stocks et des créances

7 réflexions au sujet de « Analyse financière : les méthodes de valorisation des stocks »

  1. Enfin! Très bon article une fois de plus. Dommage que vous n’en rédigiez plus autant qu’avant. Petite perte d’inspiration de votre part ou disparition des opportunités ? 🙂

    1. Bonjour Hans,

      Si les opportunités se font plus rares, il en persiste encore, rassurez-vous. Quant à l’inspiration, elle est toujours présente.

      Mais vous avez raison : les articles « gratuits » se font plus rares sur le blog. En effet, nous mettons la plus grande partie de notre énergie pour trouver de nouvelles daubasses d’une part et, d’autre part, pour proposer à nos abonnés les articles les plus qualitatifs possible. Nous ne souhaitons cependant pas négliger ce blog grâce auquel « tout a commencé » et nous continuerons à vous proposer une partie du résultat de nos élucubrations. Mais il est vrai qu’une autre partie de ces élucubrations sera réservée aux abonnés qui ont eu la gentillesse de nous faire confiance.

  2. J’ai egalement trouve cet article tres intéressant, il permet de mieux comprendre les petites lignes des rapports annuels.

    Si je pouvais donner une suggestion pour un prochain article, ce serait d’aborder les rapports des commissaires aux comptes, dont on a du mal à interpréter le propos (formalisation du propos trop neutre peut-être).

  3. Petite coquille:
    Néanmoins, en période de forte inflation, elle pourrait, comme la méthode LIFO, surestimer le résultat et la valeur réel de l’actif.
    FIFO?

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