Bas les masques : Semileds

Au cours des mois de juillet et août, il n’y a pas vraiment eu de trêve estivale pour notre portefeuille. Les opérations d’achat et de vente se sont succédées à un rythme soutenu.

Depuis quelques semaines, nous vous dévoilons une par une chacune des opérations qui ont été débouclées au cours de cette période.

Ainsi, après Renewable Energy Corporation Group et Oceana Gold, c’est de Semileds que nous allons vous parler.

Le 9 janvier 2013, nous achetions 3 250 actions de cette société au cours de 0,80 usd. Une société techno avec une grosse décote sur ses actifs tangibles, c’est exactement ce que nous apprécions le plus dans l’équipe des daubasses. En effet, la valeur de son actif net tangible était, à l’époque, de 4,76 usd, soit un potentiel selon notre approche de x6 !

Néanmoins, le 1er août 2013, nous liquidions notre position à un prix de 1,22 usd avec une plus-value de +/- 50 % en 6 mois … plus-value appréciable certes mais évidemment bien loin de nos espérances.

class actionLa raison pour laquelle nous avons liquidé notre ligne s’explique par le fait que pas moins de 5 cabinets d’avocats ont entamé des poursuites judiciaires contre la direction mais aussi la société elle-même en raison d’informations erronées ou dissimulées concernant les produits, la perte d’un client et la pression sur les prix ! Tous les actionnaires qui ont acheté des actions Semiled entre le 9 décembre 2010 et le 12 juillet 2011 peuvent participer à ces poursuites judiciaires. Comme ce n’est pas notre cas et qu’en cas de gain de cause des plaignants, la société devrait débourser une somme pour l’heure inconnue mais qui diminuerait forcément la valeur patrimoniale de l’entreprise. A défaut de plus de précision sur les enjeux, nous avons donc décidé de quitter le bateau.

Une nouvelle preuve, si besoin en était, du fait qu’une énorme marge de sécurité protège l’investisseur contre les imprévus. A notre cours d’achat, le marché prévoyait « le pire » pour Semileds et, malgré une mauvaise nouvelle, l’importance de la marge de sécurité au moment de l’achat nous a permis de sortir gagnant de l’opération.

Comme d’habitude, nos abonnés ont été tenus au courant en temps quasi réel de nos opérations et ont pu découvrir dans notre lettre du mois de février les arguments qui nous avaient incités à procéder à cette acquisition. Nous mettons à présent cet article à votre disposition.

Attention, il date de près de 8 mois et certaines données ne sont, bien entendu, plus d’actualité.

Bonne lecture.

 

SemiLEDs Corporation

(Nasdaq, Ticker: LEDS / ISIN : US8166451059)

 

I. Introduction

 

Semileds est une société américaine qui fabrique et vend des puces et des composants LED. Ses produits peuvent être utilisés pour l’éclairage mais aussi dans des applications industrielles spécialisées comme le durcissement des polymères, la luminothérapie, la détection des faux billets ou dans le domaine horticole.

SemiLEDs

La société vend ses produits en se concentrant essentiellement (mais pas exclusivement) sur 4 marchés pour le moins porteurs : la Chine, Taïwan, la Russie et les Etats-Unis. Le plus gros client représentait, en 2012, 24 % des ventes.

industrie du ledLa plus grosse partie de ses actifs, ainsi que ses activités de recherche et développement, se trouve à Taïwan, la « Chine Insulaire et Capitaliste », notre nouveau « dada ».

L’entreprise a également créé des joint-ventures en Malaisie et en Chine. Cette dernière connait de gros problème et la direction a décidé de ramener sa valeur dans les comptes à 0.

De l’aveu même de la direction, le secteur dans lequel Semileds est active est soumis à une grosse pression concurrentielle, … pression concurrentielle qui entraîne, par la force des choses, des pressions sur les prix de vente et donc sur les marges de l’entreprise.

bourse et sociétés high techLa direction reconnait même que Semileds a plus de difficulté à réduire ses coûts pour abaisser ses prix que ses concurrents. Néanmoins, elle annonce que les derniers investissements réalisés visent à améliorer la productivité. Elle prévoit d’ailleurs de continuer à investir dans l’avenir dans le même but … ce qui risque d’augmenter la part des frais fixes et d’abaisser la solvabilité de la société.

Même si la société dispose d’un confortable matelas de liquidités, ce dernier point ainsi que le fait qu’elle n’a presque jamais été capable de générer des résultats d’exploitation positifs n’est pas vraiment pour nous plaire, comme vous pouvez l’imaginer.

 

Nous travaillons avec les comptes annuels arrêtés le 31/08/2012. Le 10 janvier, nous avons acheté 3250 actions Semileds au coût de revient, frais de courtage inclus, de 0,811 usd.

 

II. La Valeur d’Actif Net Net (VANN)

 

Nous relevons un actif courant de 2,74 usd, duquel nous soustrayons les intérêts des minoritaires et les dettes, et obtenons une VANN de 2,02 usd par action.

 

III. La Valeur d’Actif Net Estate (VANE)

 

Semileds détient des immeubles acquis pour 0,53 usd par action. Après application de notre traditionnelle marge de sécurité de 20 %, nous pouvons établir la Valeur d’Actif Net Estate à 2,44 usd.

valeur de l'immobilier

 

IV. La Valeur en cas de Mise en Liquidation Volontaire (VLMV)

 

Revenons à l’actif courant et à son poste principal qui est composé de … cash et de placements à court terme. L’ensemble de ces deux postes représentent 2,04 usd par action. Ceci nous permet de constater que Semileds est aussi une « triple nette » : en déduisant l’ensemble du passif du cash, nous obtenons 1,32 usd. Ce qui signifie qu’il y a moyen de payer la société en utilisant uniquement ses propres liquidités et que tout le reste est reçu « gratos ». On voit donc ici que le marché anticipe clairement une poursuite de la destruction du cash par la direction.

Les produits de Semileds restent en moyenne en stock pendant 136 jours, en investistir dans les technosamélioration par rapport à la moyenne des 3 derniers exercices (176 jours). Cela nous semble assez long. Nous constatons aussi que 20 % de l’inventaire est constitué de matières premières et donc 80 % de produits en cours de fabrication ou de produits finis. La direction a également acté des réductions de valeur de 18 % sur ce poste, ce qui témoigne d’une certaine prudence. Néanmoins, en 2012, nous avons dû constater que l’entreprise a été contrainte de vendre l’ensemble de ses produits en dessous de ses coûts de production, ce qui nous fait malgré tout douter de la réelle valeur de ce poste. Malgré la prudence de la direction dans ses valorisations et l’accélération de sa vitesse de rotation, nous décidons de prendre une marge de sécurité de 50 % par rapport à la valeur aux comptes et déduisons donc 0,24 usd.

Les clients de la société paient, en moyenne, leurs factures à 59 jours, ce qui nous semble assez correct. De plus, la direction a provisionné 12 % du montant total à titre de créances douteuses. Nous constatons néanmoins qu’un client de la société, qui ne représente que 3 % des ventes, « pèse » pour 11 % dans les créances. Nous ne connaissons pas les raisons d’un tel traitement de faveur mais notre prudence légendaire nous impose de considérer cet élément avec circonspection. Pour toutes des raisons, nous allons valoriser la créance de ce client à 0 et prendre une marge de sécurité de 10 % sur les autres créances. Nous amputons donc la valeur de Semileds de 0,03 usd.

Au niveau de l’actif fixe, outre les immeubles abordés dans la VANE, nous tenons compte des installations de production pour un montant équivalent à 5 % de leur coût d’acquisition, soit 0,13 usd.

Nous retenons également les participations dans les joint-ventures pour la moitié de leur valeur aux livres, soit 0,03 usd.

Hors bilan, nous tenons compte de 75 % des engagements de loyers futurs à payer, soit 0,11 usd.

Compte tenu de ce qui précède, nous établissons la Valeur de Semileds en cas de mise en liquidation volontaire à 2,21 usd.

V. La Valeur de la Capacité Bénéficiaire (VCB)

 

Au cours des 5 dernières années, l’entreprise n’a publié qu’une seule fois un résultat d’exploitation positif. Nous ne pouvons donc pas calculer cette valeur.

 

VI. Conclusions

 

A notre coût d’acquisition de 0,81 usd, nous avons obtenu nos actions Semileds avec une marge de sécurité de :

60 % sur sa VANN

67 % sur la VANE

64 % sur la VLMV

Le point fort de cette société, c’est évidemment son énorme force de frappe en termes de liquidités disponibles, mais il y a également des points faibles.

Tout d’abord, nous remarquons que ces liquidités proviennent essentiellement d’une augmentation de capital en 2010. En dehors de cet apport, l’entreprise n’a fait que détruire du cash au cours de son existence. La question qui se pose est donc de savoir si les liquidités actuelles seront suffisantes pour permettre à la société de finaliser ses investissements de « productivité » sans qu’elle ne doive, une fois de plus, diluer ses actionnaires par des émissions de titres intempestives.

Nous devons aussi remarquer que, pour l’heure, le cours de l’action est inférieur à 1 usd. Ce qui signifie qu’il existe un risque non négligeable de delisting.

Pourtant, au-delà de ses faiblesses, nous relevons quelques points encourageants :

– Semileds se constitue au fil du temps un capital « savoir-faire » intéressant. En effet, au cours de ces 5 dernières années, elle a dépensé 0,66 usd en recherche et développement, ce qui n’est pas négligeable par rapport à son cours actuel et constitue probablement, au moins en partie, une valeur « cachée » et intangible, de quoi, peut-être un jour, susciter l’appétit d’un concurrent ?

– La direction fait preuve d’une certaine transparence vis-à-vis de ses actionnaires : elle ne tente pas de faire apparaître « la mariée plus belle qu’elle n’est », provisionnant sur le plan comptable quand c’est nécessaire et exposant sans complexe les faiblesses de la compagnie. (ndlr : par transparence vis-à-vis de nos lecteurs, nous exposons ce que nous avions écrit il y a 8 mois, force est de reconnaître aujourd’hui, suite aux « class actions » qui sont lancées que nous étions sans doute trop optimistes sur ce point)

– Enfin, le conseil d’administration semble réellement vouloir que les choses bougent : début janvier, le CEO a démissionné et un CFO intérimaire a été nommé. Peut-être sont-ce là les premiers catalyseurs d’une recovery ?

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