Ce ne sont pas toujours les sociétés qui semblent les plus solides qui génèrent les plus beaux rendements … même si ce sont souvent celles qui évitent les plus grosses pertes.
La société que nous démasquons dans cet article répond parfaitement à l’appellation de « daubasses peinardes » : une excellente solvabilité, des bénéfices récurrents … mais, justement, peut-être le genre de société dans laquelle une direction peu dynamique peut se permettre de « rester dans ses pantoufles » sans se remettre en question.
ADDvantage avait été achetée en 2 lots, le 23/11/2011 et le 04/01/2012. Le 28/05/2014, nous l’avons revendue en raison d’une acquisition qui s’est effectuée largement au-dessus de la valeur des fonds propres de la cible. Et ce qui devait arriver arriva : une partie des actifs bien tangibles d’ADDvantage qui s’avérait en l’occurrence être du cash disponible se trouva transformés en actifs intangibles, ici du goodwill. Ce « miracle » entraîna une baisse de la valeur d’actif net tangible de la société en dessous du cours de cotation.
Ceci dit, l’importance des marges de sécurité que nous prenons nous protège généralement de ce type « d’évaporation de valeur » puisque nous pûmes malgré tout réaliser une plus-value de 25,8 % en tenant compte de la taxe sur les opérations de bourse et des frais de courtage.
Comme d’habitude, nos abonnés ont été tenus au courant des opérations du portefeuille de notre club en temps presque réel.
Vous trouverez ci-dessous l’analyse que nous avions mise à leur disposition lors de notre lettre de décembre 2011 ainsi que les news de suivi publiées tout au long de la détention de nos titres.
Nous vous en souhaitons une bonne lecture.
ADDvantage Technologies Group Inc
(Nasdaq, Ticker: AEY / ISIN : US0067433062)
I. Introduction
ADDvantage Technologies Group est un distributeur de produits électroniques pour l’industrie de la télévision par câble. Ses produits sont utilisés pour la diffusion de signaux de communication que ce soit par fibres optiques, câbles ou système de communication sans fil. Elle vend, entre autres, des produits Cisco, Motorola, Fujitsu et … d’une vieille connaissance : Blonder Tongue, présente dans le portefeuille du club.
Les clients de la société sont des câblo-opérateurs et des fournisseurs de services de communication comme la télévision, l’internet et la téléphonie.
Elle vend aussi en direct et peut procéder elle-même à des réparations et assurer le service technique pour le compte des marques qu’elle distribue.
La clientèle est relativement diversifiée : le plus gros client représente 9 % du chiffre d’affaires, les 5 plus gros 26 % et la société possède un fichier « clients » comprenant 1300 références.
Ses ventes sont réalisées au travers d’un réseau de filiales régionales. 85 % d’entre elles sont réalisées aux Etats-Unis mais l’entreprise exporte aussi vers l’Amérique latine et le Canada.
L’accord de distribution avec Cisco, son principal fournisseur, qui est arrivé à expiration fin 2010 n’a pas été renouvelé, ce qui explique l’atterrissage assez brutal du cours. Cisco représentait en 2010 un peu plus de 30 % de ses achats totaux.
Dorénavant, ADDVantage ne pourra plus commander directement les produits Cisco mais devra passer par l’intermédiaire d’un autre revendeur. Ceci entraîne plusieurs inconvénients : la société ne peut plus vendre qu’à des consommateurs finaux et non à d’autres revendeurs. Les exportations en dehors des US pour ces produits lui sont également interdites. On peut également supposer que les prix d’achat seront un peu plus élevés à présent.
Nous travaillons avec les comptes arrêtés au 30/06/2011. En raison du collatéral tangible un peu plus faible que sur les autres sociétés que nous acquérons, nous avons tenté de constituer notre ligne à un cours bas. Nous n’avons finalement pu obtenir toutes les actions que nous souhaitions. Le coût de revient, frais de courtage inclus de notre ligne, s’élève à 1,93 usd.
II. La Valeur d’Actif Net Net (VANN)
A notre coût d’achat de 1,93 usd, nous pouvons acquérir un actif courant de 4,30 usd duquel nous déduisons les dettes représentant 1,73 usd. La VANN s’établit donc à 2,56 usd.
III. La Valeur d’Actif Net Estate (VANE)
Nous remarquons des immeubles acquis par la société pour 0,71 usd par action. Après application de notre traditionnelle marge de sécurité, nous obtenons une VANE de 3,13 usd.
IV. La Valeur de Mise en Liquidation Volontaire (VLMV)
Nous revenons sur l’actif courant et particulièrement le stock qui en est, et de loin, le principal poste. Il représente 2,62 usd par action. Notre inquiétude provient du fait que sa rotation est particulièrement lente : en moyenne, un article reste 392 jours en stock avant d’être vendu. Et en plus, cette rotation tend à ralentir par rapport aux exercices précédents. Certes, nous comprenons qu’un revendeur se doit de détenir un stock suffisant pour répondre à l’ensemble des besoins de sa clientèle, c’est même essentiellement son rôle en tant qu’intermédiaire entre le fabricant et le client final. Nous constatons aussi que la direction ne lésine pas sur les réductions de valeur : l’équivalent de 7,9 % de la valeur d’acquisition des marchandises stockées a été acté dans les livres, ce qui dénote une certaine prudence quant à l’application des règles d’évaluation. Il n’empêche, dans un secteur où l’obsolescence technologique doit être assez forte, cet état de fait n’est pas pour nous plaire et nous décidons, d’autorité, d’amputer la valeur aux livres de l’inventaire de 40 % supplémentaires, soit 1,05 usd.
L’autre poste important de l’actif courant appelle moins de commentaire : il s’agit du cash détenu sur les comptes bancaires qui s’élève à 1,18 usd par action.
Le poste de créances semble bien maîtrisé : il ne « pèse » que 0,32 usd par action, ce qui signifie que les clients de ADDVantage paient en moyenne à 34 jours, ce qui nous semble excellent d’autant que ce délai a, contrairement au stock, tendance à diminuer avec le temps. La direction a, de surcroît, acté des provisions pour créances douteuses équivalentes à 8,4 % de l’encours. Bref, nous reprenons ce montant tel quel.
Par contre, dans l’optique d’une mise en liquidation de l’entreprise, nous ne reprenons pas le poste d’actif d’impôts différés et retirons donc 0,13 usd de valeur comptable.
Dans l’actif fixe, outre les immeubles abordés dans le calcul de la VANE, nous reprenons symboliquement les installations diverses pour 5 % de leur coût d’acquisition, soit 0,01 usd.
En matière de dilution, l’impact des stocks options sur la VMLV de ADD Vantage reste marginal et nous n’en tenons pas compte.
Hors bilan, nous relevons que, même si la société loue une partie des locaux qu’elle occupe, ces baux sont annuels. Autrement dit, il n’y a quasiment pas d’engagement à payer des loyers futurs.
En fonction de tous ces éléments, nous établissons la valeur d’ADDVantage en cas de mise en liquidation volontaire à 1,96 usd.
V. La Valeur de la Capacité Bénéficiaire (VCB)
ADDVantage est une daubasse qui génère régulièrement des profits. Son résultat d’exploitation moyen par action de ces cinq dernières années s’élève à 0,83 usd. Actualisé à 12 %, après application d’une décote de 35 % à titre d’impôt sur le résultat, nous obtenons un montant de 4,50 usd. Nous ajoutons la trésorerie de l’actif et déduisons les dettes financières et obtenons une VCB de 4,45 usd.
VI. La Valeur d’Actif Net Rentable (VANTre)
Comme vous venez de le voir, cher(e) lecteur(trice), ADDvantage est une société qui a généré pas mal de profits par le passé, tellement de profits même qu’elle est éligible au calcul de la VANTre : en effet, au cours des 5 dernières années, elle a généré un rendement sur capital investi moyen de 12,76 %. Nous tenons donc compte de la décote sur son actif net tangible qui s’élève à 3,30 usd.
VII. Conclusions
A notre coût d’achat de 1,93usd, nous avons donc acheté des actions ADDVantage avec des marges de sécurité de :
24,6 % sur la VANN
38,3 % sur la VANE
56,6 % sur la VCB
41,5 % sur la VANTre
Evidemment, toute la question est de savoir comment la société pourra faire face aux deux difficultés auxquelles elle est confrontée, c’est-à-dire la perte de la possibilité d’acheter « en direct » chez Cisco et le ralentissement des investissements des câblo-opérateurs en raison des craintes de récession.
Pour notre part, nous pensons (espérons) que la perte de « l’exclusivité Cisco » n’aura qu’un impact limité sur la rentabilité de l’entreprise : certes, elle perd quelques marchés et ses marges brutes seront sous pression mais cela ne concerne finalement que 30 % de ses approvisionnements et, surtout, nous pensons que le fait de devoir acheter par un intermédiaire présente également des avantages comme celui, par exemple, de ne pas devoir tenir un stock « just-in-time » et des frais de logistique plus réduits.
Quant au ralentissement des investissements des câblo-opérateurs, nous pensons qu’ils sont momentanés : le passage de plus en plus fréquent au « triple play » qui oblige les fournisseurs d’accès à moderniser leur réseau devrait les inciter, tôt ou tard, à reprendre leurs achats.
D’ailleurs, les évènements ont plutôt tendance à nous donner raison : pour l’année 2011 en cours (les comptes sont clôturés le 30/09, nous avons donc déjà 9 mois d’exploitation à disposition), ADDvantage présente toujours des résultats bénéficiaires … en repli c’est vrai, mais largement bénéficiaires tout de même.
NEWS DE SUIVI
Vous trouverez ci-dessous les différents évènements d’actualité tels que nos abonnés ont pu les découvrir au fil de nos lettres mensuelles.
2012 Janvier
Notre distributeur d’électronique a publié ses comptes annuels et, comme prévu, les ventes ont souffert à la fois par la fin du contrat avec Cisco, par le ralentissement économique mais aussi le fait que l’industrie de la télévision limite pour l’instant ses investissements.
Ceci n’a toutefois pas empêché la société de publier un bénéfice de 0,25 USD par action (ce qui correspond à un per de 7 en fonction de notre coût d’achat). Quant à la VANT, elle a augmenté à 3,33 USD
2012 Mars
L’entreprise a publié les résultats du premier trimestre, clôturé le 31/12. Les effets de la perte de l’exclusivité Cisco se font sentir : un chiffre d’affaires en baisse de 20 % et un résultat net en baisse de 43 %.
2012 Mai
Changement de CEO pour ce grossiste en matériel technologique. C’est David Humphrey qui prend les rênes de l’entreprise. Ne nous demandez pas ce que nous pensons de ce changement : nous n’avons pas le plaisir de connaître ce monsieur…
2012 Juin
Ce distributeur de matériel pour le câble a annoncé un 2e trimestre en légère perte. Néanmoins, cette perte est due exclusivement au coût du remboursement anticipé d’un crédit bancaire à long terme.
Sans cette charge exceptionnelle, le résultat aurait été légèrement positif. La VANT se maintient à 3,27 usd.
Le nouveau CEO compte utiliser la solidité du bilan de l’entreprise pour procéder à des acquisitions. Espérons que ce sera à bon escient car, à ce jour, nous avons plutôt de mauvaises expériences avec les acquisitions effectuées par nos daubasses.
2012 Août
La société a publié ses résultats pour le 3e trimestre 2012, clôturé le 30/06. Ils sont assez stables même si la société souffre toujours du ralentissement conjoncturel dans le secteur de la télévision par câble. Néanmoins, sur les 9 premiers mois, le grossiste a généré un profit de 0,08 usd par action.
2013 Janvier
La société a publié des résultats en demi-teinte pour son 4e trimestre avec une chute des ventes de 25 %. Néanmoins, le résultat reste bénéficiaire notamment grâce à une baisse des charges d’intérêt. Sur l’ensemble de l’exercice, nous obtenons un bénéfice par action de 0,12 usd et la VANT a légèrement augmenté pour s’établir à 3,51 usd. La crise dans le secteur de la télévision par câble aux Etats-Unis continue donc à se refléter dans les résultats de notre société. Le CEO annonce la possibilité d’acquisitions futures, ce qui, comme vous le savez, est loin de nous mettre en joie.
2013 Mars
Nous prenons connaissance des résultats satisfaisants pour le 1er trimestre 2013 (clôturé le 31/12). Les ventes sont en hausse de 7 % et le bénéfice net par action a doublé. La direction explique ces bons résultats par les mauvaises conditions climatiques qui ont empêché les fabricants de livrer leurs clients. La position de « grossiste-stockeur » d’ADD lui a permis de dépanner cette clientèle. La trésorerie de l’entreprise est assez confortable et permet à la direction de racheter des petits lots d’actions propres (170 000 au cours du mois de décembre) : voilà pour des collectionneurs de daubasses un excellent moyen de ristourner de la valeur aux actionnaires.
2013 Mai
Rien de particulier à signaler pour notre grossiste en câbles pour télécom et télé distributeurs, si ce n’est la nomination d’un nouveau directeur commercial.
2013 Juin
Pour son 2e trimestre clôturé le 31/03, la société annonce une baisse de 11 % de son chiffre d’affaires. Sur l’ensemble de son premier semestre, cela n’a pas empêché un presque triplement du bénéfice par action, à 0,11 usd. La direction annonce également avoir procédé à des rachats d’actions propres mais elle a décidé de suspendre ces rachats car elle souhaite conserver de la trésorerie pour réaliser quelques acquisitions. Espérons que celles-ci seront réalisées à bon escient : vous savez, ami(e) lecteur(trice), tout le mal que nous pensons, en général, des opérations de croissance externe.
2013 Septembre
Baisse du chiffre d’affaires de 16 % et division par 2 du bénéfice par action pour notre grossiste en équipements pour la télévision câblée. Néanmoins, sur les 9 premiers mois, le bénéfice reste en hausse à 0,13 usd par action. Si la société nous semble bien gérée par les frères Chymiak, les velléités affirmées et réaffirmées de croissance externes ne sont pas pour nous plaire tant notre expérience nous montre qu’elles sont rarement relutives.
2013 Octobre
Rien de particulier à signaler pour la société, si ce n’est le renforcement de sa force de vente avec l’engagement de plusieurs anciens vendeurs de Motorola.
2014 Janvier
La reprise semble se faire attendre dans le secteur des équipementiers de la télévision par câble. Pour son exercice 2013 clôturé le 30/09, notre grossiste a publié un chiffre d’affaires en baisse de 5 %. Par contre, le résultat net augmente de 40 % pour s’établir à 0,17 usd par action. Mais surtout, horreur … le CEO annonce que, vu la belle trésorerie détenue par ADD, il envisage des opérations de croissance externe. Vous savez, cher(e) lecteur(trice), toute la répugnance que nous éprouvons pour ce genre de « gaspillage ». En attendant, nous avons une VANT qui augmente légèrement à 3,71 usd et le rendement sur capital investi moyen des 5 dernières années est toujours de 8 %.
2014 Mars
L’entreprise a annoncé avoir cédé une branche d’activité non stratégique pour une somme de 2 millions de dollars. La Direction ne nous donne pas suffisamment d’explications sur l’impact patrimonial de la transaction, mais il semble qu’il soit insignifiant.
Par contre, les résultats du 1er trimestre 2014 (clôturés le 31/12) ne nous semblent pas d’excellente facture : une baisse du chiffre d’affaires de 28 % et un bénéfice par action divisé par 4 (0,02 usd). La VANT s’établit à 3,66 usd.
2014 Avril
La société a reçu du Nasdaq une menace de delisting suite à la démission d’un de ses administrateurs indépendants, ceux-ci n’étant plus majoritaires au sein du conseil d’administration. Néanmoins, ADD annonce qu’un administrateur « non indépendant » va démissionner, ce qui permettra ainsi de rétablir l’équilibre entre indépendants et non indépendants.
Ceci mis à part, nous apprenons surtout que l’entreprise a réalisé une acquisition au cours du 1er trimestre, celle de Nave Communication pour un montant équivalent à environ 1 usd par action ADD. Si vous connaissez notre réticence sur les politiques de croissance externe, nous laissons à ADD le bénéfice du doute : le prix payé ne semble pas excessif et, surtout, la Direction annonce que l’achat sera relutif dès 2014. Peut-être une mauvaise nouvelle qui pourrait apporter de bonnes surprises donc …
2014 Juin
Superbe hausse de 23 % des ventes pour le 2e trimestre de notre grossiste en matériel pour le câble … essentiellement due à l’acquisition de Nave Communications dont nous vous avions parlé le mois passé. Ceci dit, même sans cette acquisition, le chiffre d’affaires aurait augmenté de plus de 5 %. Néanmoins, sur l’ensemble du semestre, les ventes de la nouvelle acquisition ne compensent même pas la perte du chiffre d’affaires à périmètre comparable. La perte du trimestre s’élève à 0,09 usd par action mais la direction estime que cette perte n’est pas récurrente car essentiellement portée par une branche d’activité qui a été cédée entre temps et par les coûts d’acquisition de Nave.
Néanmoins, comme nous vous l’avions annoncé, nous avons vendu notre ligne : cette acquisition a, en effet, dopé les actifs intangibles de la société et donc, mécaniquement, abaissé la VANT sous le cours actuel.