Bas les masques : Adler Real Estate

La société que nous dévoilons avant les fêtes est assez ancienne au sein de notre portefeuille. La première position a été constituée pour 1 800 actions le 10 août 2009 à un coût de revient, frais de courtage inclus de 0,665 euros. Le 15 avril 2010, nous avons renforcé la ligne par l’acquisition de 2 900 actions supplémentaires à un coût de revient de 0,615 euros. Nos abonnés ont, comme d’habitude, été tenus informés en temps quasi réel de ces opérations.

Aujourd’hui, nous comptons une plus-value latente de plus de 100 % : le cours de clôture de ce vendredi indiquait 1,33 euros.

Ci-dessous, nous vous proposons de prendre connaissance de l’analyse que nous avions proposée à nos abonnés à l’époque de ces achats ainsi que des différentes news de suivi dont ils ont pu prendre connaissance au travers des lettres mensuelles, ce qui vous permettra de comprendre les raisons de ce doublement de cours.

Comme vous pourrez le lire, même si le cours  est, à présent, assez proche de notre seuil de vente que constitue la VANT, il semble qu’il resterait un potentiel intéressant : un des fonds ayant pris le contrôle de la société annonce estimer sa juste valeur à 3 euros… information subjective à prendre évidemment avec d’énormes pincettes.

Voici donc, pour commencer, l’analyse reprenant nos arguments d’achat… Attention : elle date de décembre 2009 et même si, dans l’ensemble, elle reste valable, certains éléments ne sont plus d’actualité.

 

Adler Real Estate est un promoteur immobilier allemand. Fondée en 1880, la société a successivement fabriqué des bicyclettes, des automobiles et des motocyclettes avant de se reconvertir, en 2000, dans son activité actuelle. La société développe des projets dans l’immobilier commercial et résidentiel.

Le 10 août, nous avons acheté des actions Adler Real Estate à un prix de revient, frais de courtage inclus, de 0,665 euros.

 

I.                  La valeur d’actif net net (VANN)

Lorsque nous avons acheté nos actions, nous nous étions basés sur les derniers résultats disponibles, à savoir les résultats au 31/12/08.  A cette date, le ratio net net était très attrayant : nous avions des actifs courants (essentiellement un stock d’immeubles) pour 2,384 euros par action et des dettes pour 0,708 euros. La VANN s’établissait donc 1,676 euros, ce qui nous laissait une marge de sécurité de 60 % sur cette valeur.

Depuis, les comptes semestriels ont été publiés et notre méthode semi automatique nous entrevoir une VANN de 0,714 euros. Que s’est-il donc  passé au cours de ce premier semestre ? Pas grand-chose en fait : une perte de 0,14 euros par action mais surtout un fort ralentissement dans la rotation du stock qui nous oblige, en fonction de notre pilotage automatique, à réduire la valeur de ce poste très fortement : nous avons amputé les valeurs inscrites aux livres pour les stocks de 1,315 euros. Sans cette opération, notre marge de sécurité s’élèverait encore à 52 % au lieu d’être nulle !

 

II.               La valeur d’actif net estate (VANE)

Les immeubles détenus en propres représentent, en valeur d’acquisition diminuée de la traditionnelle marge de sécurité de 20 % une valeur anecdotique de 0,039 euros. La VANE s’élève donc au 30/06/09 à 0,753  euros et nous n’avons donc plus aucune marge de sécurité sur cette valeur.

Immobilier allemand

 

III.           La valeur de mise en liquidation volontaire (VMLV)

Nous allons revenir sur l’actif courant. En effet, il convient de s’interroger sur l’ampleur de la réduction de valeur que nous avons opérée sur les stocks : celle-ci atteint 62,7 % de la valeur inscrite aux livres et il convient de se demander si elle est bien rationnelle.

Nous constatons tout d’abord que la direction a acté des dépréciations équivalentes à 25,6 % par rapport aux coûts d’acquisition et de production de ce stock immobilier. Cette attitude nous semble prudente et rationnelle.

immobilier allemand2Pour ce faire, nous allons examiner la situation du marché immobilier allemand. En réalité, il s’agit d’un marché bien moins « passionnant » que le marché immobilier français et même plus ennuyeux que le marché belge.

Sur base d’une enquête réalisée par le réseau d’agents immobiliers ERA, le marché immobilier allemand n’aurait été qu’effleuré par la crise. Les prix de l’immobilier résidentiel auraient baissé de seulement  2%. Nous notons également que 74 % du parc immobilier résidentiel allemand a été construit avant 1978. A moyen terme, il semblerait que l’Allemagne devrait être un des pays européens parmi les moins touchés par la crise.

Compte tenu de ceci, nous pensons que les réductions de valeur actées par la direction sont prudentes et raisonnables et décidons, dans le cadre de notre approche de mise en liquidation volontaire, de n’appliquer qu’une décote de 12 % supplémentaires par rapport à la valeur reprise aux comptes (au lieu des 62 % de notre approche semi automatique). Dans cette optique, nous augmentons donc la valeur de la VANN de 1,078 euros.

En ce qui concerne les autres postes de l’actif courant, le cash en banque et les impôts à recevoir n’appellent aucun commentaire.

Nous n’avons que peu d’informations sur les postes de créances.  Ceux-ci ne représentent cependant qu’une part infime de l’actif courant. Nous décidons de prendre, par principe, une marge de sécurité de 25 % sur ces postes et déduisons donc 0,008 euros de la VANN calculée ci-dessus.

Projet Lake Forrest aux USA
Projet Lake Forrest aux USA

Parmi les actifs immobilisés, nous remarquons, outre l’immobilier détenu en propre que nous avons abordé dans le calcul de la VANE, une rubrique de participation dans des entreprises associées. La plupart de ces participations sont insignifiantes ou présentent des fonds propres négatifs. Nous n’en tiendrons pas compte. Seule participation digne d’intérêt selon nous, les 30 % détenus dans Worthing Lake Forest LLC, un projet de 334 appartements haut de gamme au Texas. Nous reprenons cette participation pour la quote-part d’Adler dans ses fonds propres amputée d’une marge de sécurité de 30 % soit 0,053 euros.

Dans les actifs disponibles à la vente, nous trouvons une participation de 7,5 % dans De-Hoek-Nord S-Park, un immeuble de bureaux à proximité de l’aéroport d’Amsterdam. Nous reprenons également ce poste la quote-part d’Adler dans les fonds propres amputée d’une marge de sécurité de 30 % soit 0,007 euros.

Il existe également un poste d’avances à des entreprises associées.  Faute de pouvoir vérifier la répartition de ces avances et tenant compte du fait que certaines de ces entreprises présentent des fonds propres négatifs, nous décidons de prendre une marge de sécurité – élevée – de 50 % et reprenons ces créances pour 0,177 euros.

Comme d’habitude, nous considérons que les impôts différés et les immobilisations incorporelles (essentiellement des licences informatiques) valent 0.

Compte tenu de ce qui précède, nous établissons la valeur d’Adler en cas de mise en liquidation volontaire à :

VANN : 0,714 euros
Immobilier en propre : 0,039 euros
Diminution de la marge de sécurité sur le stock d’immeubles : 1,078 euros
Marge de sécurité sur les créances : – 0,008 euros
Participation dans les entreprises associées : 0,053 euros
Actifs disponibles à la vente : 0,007 euros
Avance aux entreprises associées : 0,177 euros

Soit une VMLV de 2,06 euros, ce qui nous laisse, à notre coût d’achat de 0,665 euros une marge de sécurité de 67,7 %.

 

IV.           La valeur de la capacité bénéficiaire (VCB)foncière allemande

Touchée comme tous les promoteurs immobiliers par la violente crise qui a frappé le secteur, Adler Real Estate a généré des pertes en 2008 et en générera probablement encore en 2009. Mais nous constatons que la moitié de ces pertes est due à des « charges non décaissées », essentiellement des réductions de valeur sur les stocks et certains actifs.

Nous sommes persuadés qu’Adler a la capacité de traverser la crise et de générer à nouveaux des profits. Il est évidemment difficile de déterminer dans quelle mesure et surtout dans quels délais elle y parviendra : les cycles immobiliers sont généralement longs et nous n’avons aucune idée du timing du prochain pic.

Reprenant la maxime de Buffett que « mieux vaut de l’à peu près juste à du tout-à-fait faux », nous allons partir des hypothèses suivantes :

–          Adler génèrera en moyenne dans le futur un résultat moyen équivalent au résultat moyen des années 2006-2007-2008 et 2009 amputés d’une marge de sécurité de 30 %

–          Le résultat 2009 d’Adler sera négatif de 0,20 euros par action

Sur base de ces deux hypothèses et en actualisant le résultat obtenu à 12 %, nous fixons la VCB d’Adler à 0,80 euros. La marge de sécurité par rapport à notre coût d’achat s’établirait donc à 16,8 %.

 

V.               Conclusions

Par rapport à notre coût d’achat, nous avons obtenu une marge de sécurité de :

67,7 % sur la VMLV

16,8 % sur la VCB

Nous pensons avoir fait preuve d’énormément de prudence pour le calcul de nos valorisations, le timing des cycles immobiliers étant fortement aléatoire.

Ainsi, il ne nous semble exclu qu’une partie des réductions de valeur opérées par la direction puisse être « extournée » dans le futur et « doper »les profits à la hausse.

Par ailleurs, nous avons la conviction  que l’excellente structure bilantaire d’Adler qui  présente le ratio de solvabilité le plus élevé parmi les nombreux promoteurs immobiliers que nous avons eu l’occasion d’analyser (75 %) permettra à « notre » société de sortir renforcée de la crise.

 

Voici, à présent,  les différentes news qui ont jalonné la vie de la société depuis que nous la détenons :

 

Mai 2011 : ADL.DEa annoncé des résultats enfin positifs pour l’exercice 2010. La poursuite du redressement est annoncée pour 2011 ainsi qu’une belle augmentation de sa trésorerie disponible en raison du débouclage de deux opérations au début de cette année.

Septembre 2011 : Notre promoteur immobilier allemand, qui ne présente malheureusement plus de rapport financier en anglais, présente un premier semestre avec une perte coupée en 3 par rapport au même semestre de l’exercice précédent. Par contre, l’Ebitda devient positif et la solvabilité s’est encore améliorée. Nous remarquons aussi que Third Avenue Real Estate Value Fund détient 5 % du capital d’Adler. Pour rappel, Third Avenue est la maison de gestion du légendaire Martin Whitman.

Novembre 2011 : La société annonce avoir conclu la vente d’un immeuble important à Berlin. L’impact de cette vente semble très positif et, grâce à elle, la direction estime que l’année 2011 se terminera vraisemblablement sur un profit.

Janvier 2012 : Notre foncière allemande a décidé de racheter 10 % de son capital à un cours maximum de 0,67 euros. Une double preuve : celle que la société n’est pas chère mais aussi qu’elle n’a pas vraiment un problème de solvabilité puisqu’elle va consacrer une part de sa force de frappe financière pour cette opération, opération qui, comme vous le savez, ne peut que nous mettre en joie.

Mai 2012 : Ce promoteur immobilier allemand a publié un résultat positif pour la première fois depuis 2007. Comme quoi, tout arrive … même si ce bénéfice reste surtout symbolique. Grâce à la réduction de son stock d’immeubles, la société dispose à présent d’une trésorerie confortable qu’elle utilise intelligemment à des rachats d’actions propres. Au 31/12, la VANT s’établit à 1,71 euros.

participations financières dans l'aéroport de Luxembourg

Juin 2012 : Changement d’actionnaires de référence pour le promoteur allemand : le fonds Mezzanine IX Investors L.P prend les choses en main. Ils sont notamment convaincus que Adler vaut bien plus que l’euro qu’elle cote actuellement, au moins le triple selon eux (et donc 5 fois notre cours d’achat). Le nouveau boss souhaite aussi profiter de la solide structure financière de l’entreprise pour augmenter la taille du bilan de l’entreprise et investir dans l’immobilier résidentiel, selon lui, toujours bon marché en Allemagne. Une première acquisition d’un immeuble de 57 appartements a d’ailleurs déjà été conclue.

Septembre 2012 : Le promoteur allemand a publié des nouvelles pertes au 30/06. La réorganisation de la société, suite à l’arrivée du nouvel actionnaire, se poursuit avec la liquidation du portefeuille d’immobilier commercial (qui permet de générer des liquidités avec l’abaissement du besoin en fonds de roulement) et la constitution d’un portefeuille résidentiel. La direction estime que l’année 2012 se terminera avec un résultat sensiblement meilleur que 2011.

Octobre 2012 : Rien de particulier pour le promoteur allemand si ce n’est une décision de l’Assemblée Générale de prolonger le programme de rachat d’actions propres et d’augmenter les montants à y affecter. De quoi aider à réduire encore la décote.

Novembre 2012 : La société poursuit la réorientation de ses activités et la direction annonce que les ventes d’actifs non stratégiques se déroulent à un rythme plus soutenu que prévu. Il semble que, de plus en plus, l’entreprise passe du statut de promoteur à celui de foncière résidentielle. Reste à voir ce que cette métamorphose impliquera comme création de valeur pour les actionnaires.

Décembre 2012 : Un projet américain qui était gelé depuis quelques temps par manque de financement vient d’être débloqué et va pouvoir être mené à bien. Le chiffre d’affaires sur les 9 premiers mois est en hausse de 36 % mais la société présente une perte nette. Cependant, la direction s’attend à atteindre le seuil de rentabilité pour l’année entière. Grâce aux rachats d’actions propres, les fonds propres par action ont légèrement augmenté à 1,77 euros par action.

6 réflexions au sujet de « Bas les masques : Adler Real Estate »

  1. Bien joué ! Merci pour les détails dans vos calculs, j’ai pu m’exercer à retrouver les différentes valeurs avec succès sauf pour le ratio de solvabilité.
    Je n’ai pas réussi à trouver le même résultat (2.79 contre vos 0.75). J’ai utilisé votre formule suivante : fonds propres consolidés / (total du passif – liquidités et placement de trésorerie) mais pense ne pas l’avoir comprise.
    Pour les fonds propres consolidés, prenez-vous le « Sharesholder’s equity » ou la VANN que vous avez calculé ? Et dans quelle partie du bilan prenez-vous les « liquidités » et « placement de trésorerie » à soustraire au total du passif ?
    Merci pour vos articles à l’aide desquels j’apprend l’investissement sur valeur et la comptabilité !

  2. J’avais aussi acheté cette super-Daubasse, hélas j’ai revendu sur les conseils (pas très) éclairés de mon beau-fils à € 3.00 avec quand même une jolie plus-value.
    Aujourd’hui à € 6.37 je songe à remonter dans le train.
    La raison: un placement privé de € 100 millions qui a trouvé preneur en quelques heures.
    A mon avis, le potentiel actuel est en tout cas de € 10.00 à bref terme.

    Je serais intéressé de connaître votre avis sur la situation ACTUELLE de cette Daubasse.

    Bien à vous.

    Diego

    1. je confirme , elle titille les 9 e et la valeur à changée de statue … un prochain objectif à 12 reste réaliste ( FP à 14 )
      mais psycho parlant pas évident de me renforcer sur une très grosse ligne à un cours d’achat de janv 2010 à 0,62

      il est intéressant sur le site Adler de voir les achats historique des initiers : ils n’ont aussi pas perdu leur temps ….

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