Nous voulons revenir, ami(e) lecteur(trice), sur le sujet des options et de la manière dont nous les utilisons, c’est-à-dire sans levier. Dans cet article, nous avions décrit en détail la technique des options, leurs mécanismes et la manière dont nous comptions les utiliser.
Et donc, oui, comme vous l’avez compris, pour nous, l’option … « options » fait bel et bien partie de l’arsenal dont dispose le « bon père de famille » pour gérer son patrimoine. Cette approche se rapproche un peu de celle d’une compagnie d’assurance : nous assurons à notre contrepartie un prix soit à la vente (émission d’option put), soit à l’achat (émission d’options call) en échange de l’encaissement d’une prime. Il va sans dire que les prix que nous assurons à notre contrepartie sont des prix qui correspondent, selon notre estimation, soit à des bons prix d’achat, soit à des bons prix de vente … pour nous.
Si nous revenons sur cette technique, c’est parce que nous venons de vendre une de nos plus grosses lignes dont le rendement a été considérablement dopé au travers de cette méthode. La société en question, c’est Hutchinson, une techno dont vous pourrez lire l’analyse, déjà ancienne, à la fin de cet article.
L’achat d’un premier lot d’actions de cette entreprise date du 30 août 2010. A cette époque, nous calculons une VANE pour 11,63 usd par titre.
L’achat de ce premier lot nous coûte, taxes sur les opérations de bourse, frais de change et de courtage inclus, 1 435.03 euros pour 600 actions (ou 3,04 usd par action).
Mais le même jour, nous émettons des options put à un prix d’exercice de 2,50 usd c’est-à-dire que nous nous engageons, vis-à-vis de notre contrepartie, à acheter des actions Hutchinson à un prix ferme de 2,50 usd à l’échéance de l’option et ce, même si le cours est nettement plus bas à ce moment. Nous encaissons en échange de cette assurance une prime de 139,45 euros.
A cette date, le montant total investi en Hutchinson est donc de 1 435,03 – 139,45 soit 1 295,58 euros.
A l’échéance des options, le cours d’Hutchinson est supérieur à 2,50 usd. Nous conservons simplement la prime préalablement encaissées et sommes libérés de nos obligations.
Le 1er mars 2011, nous lançons une nouvelle émission de 800 options au même prix d’exercice de 2,50 usd et venant à échéance le 19 août. Pour cette émission, nous encaissons 217,35 euros
A l’échéance, le cours de l’action est largement inférieur au 2,50 usd (autour de 2,15 usd) et nous sommes obligés d’acquérir nos 800 actions à ce prix assuré de 2,50 usd. Nous décaissons donc la somme de 1 407.35 euros.
A ce stade, nous avons donc décaissé pour nos 1 400 actions la somme de 2 485,58 euros ( 1 435,03 – 139,45 – 217,35 + 1 407,35).
Par la suite, nous renforçons encore à deux reprises, fidèles à nos habitudes et allant à l’encontre de l’adage boursier voulant qu’on ne rattrape pas un couteau qui tombe.
Et donc nous prenons des bonnes « louchées » d’Hutchinson le 13 octobre 2011 (1 500 actions au cours de 1,83 usd, débours total de 2 020,94 euros) et le 3 juillet 2012 ( 1 500 actions au cours de 1,53 usd, débours total de 1 888,14 euros).
Au total donc, nous avons dépensé 6 394,66 euros pour acquérir nos 4 400 actions ( 1 435,03 – 139,45 – 217,35 + 1 407,35 + 2 020,94 + 1 888,14).
Un an plus tard, changement de tendance : la société a détruit une partie de sa valeur et notre objectif de cours diminue. A cette époque, la VANT (et donc notre objectif de vente) se situe aux alentours de 6,94 usd.
Le 13 juillet, nous émettons des options call sur la moitié de notre position, soit 2 200 options. Ces options sont à échéance décembre 2013 et présentent un prix d’exercice de 7,50 usd. Cela signifie que nous garantissons à notre contrepartie de lui vendre, à l’échéance, 2 200 actions Hutchinson à un prix de 7,50 usd et ce, quel que soit le cours de l’action à ce moment-là. Comme ce prix d’exercice est supérieur à notre objectif de cours du moment (6,94 usd), nous ne serions pas trop attristé si nous devons vendre. En contrepartie de cette assurance, nous encaissons une prime de 461,36 euros.
Le 9 août, le cours de l’action est en chute libre … et le prix de l’option que nous avions émise itou … Nous décidons alors de racheter notre engagement au prix du marché et nous payons 123,90 euros pour cela. Nos actions Hutchinson sont libérées de tout engagement et nous avons réalisé dans l’opération un bénéfice de 337,46 euros (461,36 – 123,90).
Stabilisation du cours début septembre et la prime d’option call remonte. Le 10 septembre, nous émettons à nouveau 2 200 options call mais à un prix d’exercice de 5 usd cette fois. En échange de cet engagement, nous encaissons 787,66 euros.
Au cours du mois de janvier écoulé, le titre continue son yoyo infernal et il reprend 20% sur le mois. Les chiffres du premier trimestre sont publiés. Le chiffre d’affaires est en forte croissance par rapport à l’année précédente (c’est sans doute ce qui a boosté le cours) mais ces bonnes ventes ne se traduisent pas dans les résultats qui sont en chute libre à cause notamment de dépréciations d’actifs et de pertes de change. Au niveau du bilan, la VANT chute à 4,27 USD, soit en dessous du prix d’exercice des options que nous avions émises.
Nous décidons donc de vendre notre position. Mais n’oublions pas que la moitié de cette position est précisément bloquée en garantie de nos engagements d’options call. Qu’à cela ne tienne : nous rachetons notre position pour 234,40 euros et, grâce à la diminution de leur valeur temps, nous faisons à nouveau un bénéfice sur cette opération, de 553,26 euros exactement (787,66 – 234,40).
L’ensemble de la position étant libérée, nous la vendons et encaissons 12 965,52 euros. En tenant compte des gains sur les opérations d’options call, la recette totale est donc de 13 856,24 (12 965,52 + 553,26 + 337,46) et la plus-value totale de 116,68 % faisant d’Hutchinson le 36e « bagger » de l’histoire de notre club.
Les conclusions de cette aventure ? Elles sont au nombre de deux :
– Oui, les émissions d’options, utilisées à bon escient et sans levier permettent de doper le rendement d’une position. Dans le cas d’Hutchinson, si nous n’avions pas travaillé avec des options, le rendement total de l’opération aurait été de seulement 92 % (et nous ne pourrions afficher fièrement un nouveau « bagger » à notre palmarès).
– Et non, tenter de rattraper un couteau qui tombe, dans le cadre de notre stratégie, ce n’est pas « mal ». Ce qui compte, c’est de vérifier que nous avons toujours des collatéraux tangibles en garantie de nos investissements … si c’est le cas, il ne nous semble pas que le risque de se couper soit supérieur à celui d’explosion d’une fusée en pleine phase ascensionnelle.
Comme à chaque fois, nos fidèles abonnés ont été tenus au courant en temps réel de chacune des opérations décrites ci-dessus.
Pour conclure, nous vous présentons l’analyse de la société que nous leur avions proposée au moment de notre premier achat. Attention, cette analyse date de 3 ans et demi et n’est plus d’actualité.
Analyse de la société
Hutchinson Technology Inc.
(Ticker: Nasdaq:HTCH)
I. Introduction
Comme son nom l’indique, Hutchinson est une société technologique créée en 1965.
Elle fabrique deux produits:
1. Des têtes de lecture pour disques durs (utilisés dans l’informatique, le multimédia, etc). Ils sont leaders dans la fabrication des suspensions utilisées pour tenir la tête de lecture à une distance de quelques microns par rapport aux disques. Ils fournissent cette pièce essentielle aux grands fabriquant de disques durs (comme par exemple la société Seagate qui fait partie de leurs clients).
2. Un appareil de mesure médical (InSpectra) qui mesure en temps réel la quantité d’oxygène des organes, grâce à un unique petit capteur très discret (le patient ne le sens quasiment pas) qui fonctionne par spectroscopie à infrarouge.
Le segment des têtes de lecture est très cyclique car dépendant de la demande des consommateurs finaux d’ordinateurs et de produits électroniques.
Le 31 août 2010, nous avons acheté des actions à un cours hors frais de 2,9875 usd et émis des options put. Frais inclus et si nos options sont exercées, notre prix de revient total serait alors de 2,61 usd.
II. La Valeur d’Actif Net Net (VANN)
Nous avons acquis un actif courant de 11,19 usd par action duquel nous avons déduit des dettes pour un montant de 10,18 usd. La VANN d’Hutchinson s’élève donc à 1,01 usd par action et nous n’avons aucune marge de sécurité sur cette valeur.
III. La Valeur d’Actif Net Estate (VANE)
La société détient des immeubles acquis pour un prix de 9,02 usd par action. Nous déduisons une marge de sécurité de 20 % sur cette valeur et l’ajoutons à la VANN.
Nous avons donc obtenu une VANE de 11,63 usd, ce qui, à notre coût d’achat théorique de 2,61 usd, nous procurerait une marge de sécurité de 78 %.
IV. La Valeur de Mise en Liquidation Volontaire (VMLV)
Nous revenons tout d’abord sur l’actif courant. Outre des liquidités pour un montant de 2,14 usd par action, la société détient aussi toute une série de placements de trésorerie sous forme de dettes publiques et de papier commercial et ce pour une valeur totale inscrite au bilan de 4,57 usd. Fidèle à notre (excessive ?) prudence de sioux, nous prenons une marge de sécurité de 10 % sur ce poste et amputons la VANE de 0,46 usd.
Les créances commerciales sont honorées en moyenne à 57 jours, en ligne avec le délai moyen des trois derniers exercices. La direction a constitué des provisions pour créances douteuses équivalentes à 0,6 % du montant total. Bien que le délai moyen de paiement nous semble très correct, nous trouvons ces provisions un peu faiblardes malgré tout et prenons une marge de sécurité supplémentaire sur les créances de 10 %. Nous réduisons donc la VANE de 0,19 usd.
Les stocks nous semblent eux aussi correctement gérés : un article reste en moyenne 43 jours en stock, ce qui nous semble peu pour une société de production et en ligne avec les trois derniers exercices comptables. Ils sont constitués à 40 % de matières premières. Nous décidons d’amputer la valeur de ces matières premières d’une marge de sécurité de 10 % et celle des produits finis d’une marge de sécurité de 25 %. Nous réduisons donc la VANE de 1,41 usd.
Au niveau de l’actif fixe, nous avons déjà abordé les immeubles au niveau du calcul de la VANE. Ceux-ci consistent en immeubles de bureau, centres de recherche et de formation et usines de production, tous situés dans le Wisconsin. Il faut y ajouter une nouvelle usine de production en construction en Thaïlande. Nous maintenons telle quelle la valorisation reprise dans le calcul de la VANE.
Nous reprenons également les équipements pour 5 % de leur valeur d’acquisition, soit 1,49 usd par action.
En matière de dilution, nous avons déjà tenu compte des stocks options potentiellement exerçables dans nos calculs « par action ». Dans le cadre du calcul de la VLMV, nous nous devons aussi de tenir compte du prêt convertible contracté par la société. Certes, la parité de conversion se situe à 6 usd, soit nettement au-dessus du cours actuel… mais bien en dessous de la VMLV. Autrement dit, en cas de mise en liquidation, les détenteurs du prêt auraient intérêt à demander sa conversion.
Cette conversion coûterait en dilution 2,74 usd aux actionnaires ordinaires.
Compte tenu de ce qui précède, nous avons donc établi la valeur de Hutchinson en cas de mise en liquidation volontaire à 8,32 usd, ce qui nous octroie ainsi une marge de sécurité de 68 % sur cette valeur.
V. La Valeur de la Capacité Bénéficiaire (VCB)
Les pertes d’exploitation de ces deux dernières années sont telles qu’il nous est impossible de calculer une quelconque VCB.
VI. Conclusions
A notre coût d’achat théorique de 2,61 usd, nous avons donc obtenu :
– une marge de sécurité de 78 % sur la VANE
– une marge de sécurité de 68 % sur la VMLV
En principe, ces marges de sécurité devraient apparaître comme nettement insuffisantes pour tout investisseur qui se respecte : si les pertes de l’année 2009 venaient à se reproduire en 2010, 80 % de la VMLV s’envolerait en fumée.
Néanmoins, même si nous devons humblement reconnaître ne pas tout comprendre des produits d’Hutchinson, nous avons une assez bonne conviction (à défaut de conviction absolue, impossible à obtenir avec des daubasses) que la recovery n’est pas si éloignée que cela.
– nous apprécions l’honnêteté de la direction qui explique les mauvais résultats des deux dernières années non seulement par la mauvaise conjoncture mais aussi par des pertes de marché : une prise de conscience d’un problème constitue un premier pas dans la bonne direction ;
– certaines opérations de production ont été centralisées sur un seul site et un des sites de production a d’ailleurs été fermé ;
– une restructuration a été engagée et le taux d’emploi a été fortement diminué : les primes de licenciement ont représenté 1,17 usd en 2009 ;
– des actifs de production ont été dépréciés suite à ces restructurations et cela a engendré une perte supplémentaire de 2,86 usd par action.
Des deux derniers points, nous pouvons conclure que 60 % de la perte 2009 est due à des évènements exceptionnels.
Grâce à cette restructuration, la direction estime qu’elle a abaissé ses coûts structurels de production de 7,39 usd par action, soit un montant plus ou moins égal à la perte de 2009.
Nous constatons aussi que la direction ne se contente pas de désinvestir et de (malheureusement) licencier. Elle s’est aussi lancée dans la construction d’une usine de production en Thaïlande et a lancé le second segment « biométrie » appelé à connaître une croissance intéressante à l’avenir (l’appareil InSpectra dont nous faisions mention dans l’introduction).
L’efficacité de ces mesures semble se confirmer car en 2010, malgré une nouvelle baisse (attendue par la direction) des ventes, les pertes se sont fortement comprimées. De plus, les ventes de la division Biométrie, bien que toujours assez marginales, ont connu une jolie croissance.
Néanmoins, un défaut sur certains produits du segment « têtes de lecture » va entraîner une diminution des ventes au cours du quatrième trimestre (ce qui explique probablement que le cours reste sous pression). De nouveaux frais de restructurations et les coûts de démarrage de l’usine thaïlandaise pèseront fortement sur les résultats du quatrième trimestre.
Enfin, vous connaissez, cher(e) lecteur(trice), notre goût immodéré pour les cerises (celles qui sont sur le gâteau). Dans le cas de Hutchinson, comme pour beaucoup de nos Daubasses technos d’ailleurs, cette cerise réside dans le know how de l’entreprise.
Ainsi, les frais de R&D engagés par Hutchinson se sont élevés au cours des 5 dernières années à 7,80 usd par action (trois fois notre cours d’achat théorique) et comme vous le savez, nous pensons que ces dépenses engagées doivent bien avoir une valeur, valeur non apparente dans les comptes de la société.
J’utilise moi-même les options exactement dans la même optique que la votre. Sur des petites capitalisations, il est toutefois moins facile d’utiliser les options car les premium disponibles ne sont pas nombreuses et laissent dont très peu de choix pour un prix d’achat ou de vente (dans le cas de HTHC, les premiums disponibles ne sont que de 2.5 USD, 5 USD ou 7 USD.
Oui Hervé. Les occasions de travailler avec des options sur des « daubasses » sont d’ailleurs assez rare.
Les options peuvent aussi être utilisées sur le bitcoin, j’ai fait un petit tuto ici, en fin d’article>
http://www.bitcoincours.com/2013/10/comment-trader-le-bitcoin-sans-en.html#more
Bonjour,
Utilisation très intéressante des options sauf que à ma connaissance il est impossible pour un particulier d’émettre des options. Seuls les teneurs de marché peuvent le faire à savoir le monep. Je n’ai rien trouvé sur le sujet sur le site du broker que vous utilisez. Etes vous bien sur d’avoir pu EMETTRE des options ! De plus ces produits sont d’une certaine complexité qui demande à bien être maitrisé. Le delta, le gamma, le theta, le rho, le vega, l’expiry, la vol, le strike, skew pricing black and sholes ou encore Cox robinstein…. la liste et longue et complexe pour le non initié à ce produit.
Cordialement
Bonjour Perret,
Oui, oui, nous avons bel et bien émis des options ou, si vous préférez, les avons vendues à découvert (mais en bloquant l’argent nécessaire en cas d’éventuel exercice). Il n’y a rien de miraculeux là dedans : la plupart des courtiers que nous connaissons permettent ce genre d’opération pour les investisseurs « lambda ». Nos abonnés peuvent d’ailleurs le voir dans les extraits de notre courtier qui est le reflet de toutes les opérations de notre portefeuille.
Quant aux différentes notions qui permettent de calculer une « valeur » pour une option, elle est surtout valable pour les teneurs de marché que vous citez. Pour notre part, comme nous l’expliquons, si nous parvenons à émettre des options qui nous procurent à la fois un rendement intéressant en cas de non exercice et un prix d’achat intéressant en cas d’exercice … eh bien, c’est très simple : nous passons à l’action.
Merci pour votre confirmation.
Cordialement
Bonjour,
peut-on émettre des options sur toutes les actions ?
Comment est fixer la date d’échéance de l’option ?
Merci
Bonjour Jacques,
Non, il n’est possible d’émettre des options que sur une petite partie de la cote (mais généralement, sur les sociétés les plus importantes). Les dates d’échéance sont fixes : il s’agit du 3e vendredi de chaque mois mais, pour les options les moins liquides (c’est souvent parmi celles-ci que nous faisons nos opérations), il arrive souvent que nous n’ayons à notre disposition que des échéances trimestrielles.