Ecomérages : « Sus aux vils spéculateurs … »

C’est la nouvelle devise de Nicolas Sarkozy qui, peinant à trouver son style entre Che Guevarra, Georges Bush et Massimo Gargia s’essaie à présent dans celui de Saint-Georges terrassant le dragon. 

Ainsi donc le premier des Français a fait de la lutte contre la spéculation une priorité du prochain G20 … mais il n’est pas vraiment aidé par les « technocrates de Bruxelles », vous savez : ceux qui sont la cause de tous les maux et une bonne diversion pour nos gouvernants nationaux.  Le chômage, c’est à cause de l’Europe, la crise financière … l’Europe, la crise agricole … ben c’est l’Europe … et ainsi de suite. 

Notez que justement, les « spéculateurs » ou « les marchés », c’est aussi d’excellents souffre-douleur.

Prenez la dette de la Grèce par exemple : si les taux d’intérêt sont plus élevés, c’est bien parce que « les marchés » « attaquent » la Grèce non ? 

Pas parce que le risque de voir la dette non honorée fait fuir la plupart des investisseurs « bons pères de famille » (en ce compris évidemment les compagnies d’assurance ou les fonds de pension) ?  non non non !

Pas parce que le pays a vécu au dessus de ses moyens pendant des années, trafiquant ses comptes au passage (ce qui vaudrait d’ailleurs la prison à n’importe quel dirigeant de société cotée) non non non !

Juste parce que les horrrrribles spéculateurs ont décidé, juste comme ça, pour se faire plaisir, d’étrangler une malheureuse population qui se demande encore ce qui lui tombe sur la tête.

Ceci dit, on fait comment pour « spéculer » sur une dette ?  Et bien on achète des assurances pour se couvrir contre le risque de défaut de paiement.  Ces assurances sont les fameux « CDS ».  Et les spéculateurs, en achetant une assurance dont ils n’ont pas besoin, font grimper le coût de cette assurance, ce qui rend plus onéreux l’acquisition d’obligations et donc, augmente le taux d’intérêt exigé pour couvrir le coût de cette assurance.  Vous nous suivez ?

Mais voici le meilleur : l’ensemble des CDS couvrant la dette grecque s’élève à 4 % de celle-ci et la part des CDS détenus par des hedges funds (qui matérialisent les « spéculateurs ») est de 7 %.  Autrement dit, le poids réel de la spéculation dans la hausse des taux d’intérêt de la dette grecque s’élèverait à 7 % de 4 % soit 0,28 %.  Hum,  est-ce que ça justifie une telle envolée des taux d’intérêt ?

Mais revenons à l’actualité brûlante …

Donc Monsieur Sarkozy part en croisade contre ces mêmes « marchés » accusés d’affamer le monde en spéculant sur les matières premières alimentaires.  Mais voilà qu’un petit problème surgit : il semblerait que si cette  croisade  contre la famine soit réellement une noble cause … l’ennemi n’est peut-être pas celui désigné par le clone présidentiel de José Bové. 

En tout cas, c’est ce que prétend un rapport que la Commission Européenne s’apprêtait à publier.  Selon ce rapport, « il y a une forte corrélation entre les marchés des dérivés et les prix au comptant mais il n’y a aucun élément probant qui atteste d’un lien de causalité entre les marchés des dérivés, la volatilité excessive et la hausse des prix sur les marchés physiques. »

Voyant qu’on s’apprêtait à lui casser son nouveau jouet avant même qu’il n’ait servi, Nico nous a fait une grosse colère et exige qu’on aménage ce rapport et post-pose sa publication.  C’est vrai que supprimer un tel rapport est un excellent remède à la faim dans le monde … ou que briser le thermomètre soigne la grippe.

Loin de nous l’idée de prendre position dans cette querelle « d’experts » : s’il semble évident que la prise de positions financières par le biais de futures doit forcément influencer la demande, il peut sembler tout aussi évident que les aléas climatiques, les restrictions à l’exportation pratiquées par certains pays et la production de biocarburant peuvent tout autant influencer l’offre.

Quant à nous, dans l’équipe des daubasses, on aime bien être pragmatique : la population terrestre ne fait qu’augmenter, et itou la proportion de cette population qui, auparavant, devait se contenter d’un bol de riz par jour et qui a, à présent, la possibilité de se nourrir dignement.  N’est-ce pas là la vraie raison de la hausse des prix des denrées alimentaires ?

Pour nous, il n’y a pas de miracle : le gâteau a une taille déterminée et il va falloir le partager entre plus de convives.  Autrement dit, peut-être que nous, occidentaux, devrons revoir notre mode de vie de surconsommation c’est-à-dire manger moins de produits d’origine carnée et surtout gaspiller moins. Dans nos pays développés, on a chiffré le gaspillage de nourriture à une vingtaine de kilos par an par habitant, soit 80 kg pour une famille de quatre personnes : une destruction de denrées alimentaires qui contribue certainement beaucoup à un « soutien » des prix.

Mais comment un politicien qui doit soigner sa popularité peut-il expliquer à ses électeurs qu’ils sont aussi responsables de la raréfaction des denrées alimentaires ? Et donc, qu’ils contribuent à leur enchérissement.  C’est beaucoup plus confortable d’accuser une entité impersonnelle comme « les marchés ».

Bonne daubassemaine à tous !

Liens :

Etude de Natixis sur les CDS 

Le rapport « censuré » de la Commission Européenne 

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Une réflexion au sujet de « Ecomérages : « Sus aux vils spéculateurs … » »

  1. IL ne faut jamais oublier qu’un politique ne dit ni la vérité, ni ce qu’il pense. IL dit ce que l’électeur veut entendre.
    Sarko sait très bien tout ce que vous dite, pas l’électeur.

    Les méchants ont tour a tour été, dans le désordre, les : machines, la délocalisation, les chinois, l’automatisation, la mondialisation, les juifs, les immigrés… Aujourd’hui ce sont les financiers. Tout est de leur faute. Bon, certes, voilà.

    Ils ne placent pas de l’argent, ils spéculent. Ils n’investissent pas dans des entreprises ils spéculent. Ils ne prêtent pas de l’argent aux états, ils spéculent.

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