Archives de catégorie : Analyse Financière

Analyses financières adaptées aux daubasses (6)

La valorisation des actifs courants par le contrôle de la rotation des postes de l’actif courant

Dans notre club, lorsque nous investissons, nous achetons des stocks, des créances et du cash plutôt que des entreprises proprement dites : cela nous l’avons déjà expliqué.

Cependant, il existe un risque que les stocks et les créances que nous acquérons soient finalement réalisés à un prix inférieur à la valeur inscrite au bilan.

Pour tenter de minimiser ce risque, il existe deux possibilités :

– la décote automatique de ces postes que nous avons abordée dans un précédent billet
– le contrôle de la rotation de ces postes

La semaine dernière, nous avons abordé la décote automatique.

Pourtant, si cette méthode est défendable, elle n’apporte, comme nous le suggérons en fin d’article, qu’une marge de sécurité théorique. L’investisseur qui souhaite investir de manière plus réfléchie et en connaissance de cause n’a finalement aucune certitude que la valorisation donnée par les comptes aux différents postes de l’actif courant est fiable. Simplement, il décide de payer moins cher les postes supposés être les plus « à risque ».

Dès lors la question se pose : comment, nous, petits boursicoteurs européens, pouvons-nous vérifier la fiabilité de la valeur des stocks d’un fabricant de semi conducteurs américain ou des créances détenues par un prestataire de services télécom chinois ?
Impossible direz-vous … Pas tout-à-fait répondons-nous …

Si la certitude n’est pas de ce monde boursier, les rapports de gestion peuvent nous être d’une certaine utilité pour tenter de détecter certains signaux d’alerte. Et finalement, mieux vaut de « l’à peu près juste » à du « tout-à-fait à côté de la plaque ».

C’est pourquoi nous vous proposons aujoud’hui d’aborder la deuxième méthode : le contrôle de la rotation des postes de l’actif courant.

 

1. La rotation des stocks

Pour vérifier la pertinence de la valeur des stocks nous sommes partis du raisonnement suivant : un stock qui perd de sa valeur doit avoir de plus en plus de difficultés à être écoulé.
Partant de ce constat, nous pensons qu’un stock qui « tourne » de moins en moins vite se vend de moins en moins bien. Et qu’un stock qui se vend de moins en moins bien perd de sa valeur.

Dans la pratique, nous calculons la rotation des stocks des 4-5 derniers exercices comptables.
Pour calculer la rotation des stocks, nous divisons le montant des stocks de l’exercice par la rubrique « coût des ventes » et multiplions par 365. Nous obtenons ainsi le nombre de jour moyen pendant lequel une marchandise ou une matière première reste dans le stock.
En comparant l’évolution de cette durée de détention en stock sur les 4 ou 5 derniers exercices, nous pouvons déjà constater si la tendance est à la hausse.
Pour notre part, nous préférons calculer la durée moyenne de détention en stock de ces derniers exercices et la comparer avec la durée de détention du dernier exercice. Si le dernier ratio calculé est supérieur à la moyenne des 5 derniers exercices, un petit signal d’alerte doit tinter dans un petit coin de notre cerveau.

 

2. Le délai de règlement clients

Pour les créances, nous procédons avec le même raisonnement que pour les stocks : des créances payées de plus en plus tard sont, par la force des choses, de plus en plus difficilement réalisables.

Dans cette optique, nous comparons donc le délai de paiement moyen des clients du dernier exercice avec la moyenne des 4 ou 5 derniers exercices.

Ici, pour calculer le délai moyen de paiement des clients, nous divisons le montant des créances commerciales par le chiffre d’affaires et multiplions par 365.

Nous aurions aimé appliqué une deuxième option pour les créances : effectuer la comparaison entre les provisions pour créances douteuses actées par la direction et les pertes réellement encourues sur créances. Mais nous nous sommes rendu compte malheureusement que si les sociétés publiaient quasiment toute le détail des réductions de valeur sur créances, rares étaient celles qui détaillaient les pertes réelles …

<< Les méthodes de valorisation des stocks

>> Les actifs intangibles : Pourquoi il faut s’en méfier ?

Quelques calculs savants pour augmenter la marge de sécurité

 

Lorsque nous achetons une action pour notre portefeuille de daubasses, nous achetons, non pas une entreprise, mais des actifs et même des actifs courants. Mais il nous semble que nous vous avons déjà expliqué tout ça. 

Volontairement, nous avons opté pour une analyse relativement superficielle des sociétés que nous avons acquises doublée d’une forte diversification. 

Cependant, certains d’entre nous, pour leur portefeuille personnel, ont acheté l’une ou l’autre action déjà présente au sein du portefeuille du club. 

Dans ce cas, à défaut de forte diversification comme « protection contre l’ignorance », il est indispensable d’approfondir un peu plus l’analyse et surtout, de vérifier la qualité des actifs courants qui ont été achetés. 

Il y a trois grands types d’actifs courants : la trésorerie et les placements de trésorerie, les créances et les stocks. 

Une méthode « automatique » permet d’augmenter la marge de sécurité en fonction du risque de non valeur de l’actif : ainsi, Ben Graham suggérait d’appliquer automatiquement une décote de 50 % sur la valeur des stocks reprise dans les comptes, 25 % sur la valeur des créances et aucune décote sur la trésorerie. 

En appliquant ces rabais complémentaires aux actions détenues par notre club, la décote globale que nous avons obtenue lors de nos achats par rapport à la « valeur-du-fonds-de-roulement-net-corrigée-des-décotes-standard » est de 35 %, ce qui nous semble tout-à-fait excellent. 

Ainsi, sur nos 32 sociétés, 

– 4 présentent une valeur nette nette négative après applications des décotes
– 6 ont été acquises à un cours supérieur à la valeur nette nette corrigée
– 5 ont été acquises avec une décote variant entre 0 et 30 % par rapport à la valeur nette nette corrigée
– 17 ont été acquises avec une décote supérieure à 30 % 

Cependant, il nous semble que celui qui désire un portefeuille moins diversifié devrait approfondir un minimum l’analyse de ces trois postes. 

Un simple exemple : est-il normal d’appliquer la même décote de sécurité de 50 % sur le stock d’immeubles de Barrat que sur le stock de vêtements de Vet’Affaires ? 

Nous pensons que non et, dans une prochaine rubrique, nous expliquerons comment, selon nous et de manière relativement simple, nous pouvons vérifier la pertinence de la valeur des actifs courants repris dans les comptes des sociétés « cotant sous leur fonds de roulement net ».

Analyse financière adaptée aux daubasses (6bis)

L’excédent brut d’exploitation

 

Précédemment, nous vous avons expliqué pourquoi l’ebitda pouvait être utile pour vérifier la capacité des sociétés que nous avons en portefeuille à résister avec leurs ressources propres sans devoir faire appel à des tiers (banques ou actionnaires).

Nous avons évalué, « à la grosse louche » quel serait l’ebitda de nos entreprises pour l’année 2009. Et nous sommes arrivé à un ebitda négatif de 8 485 euros, soit plus de la moitié de notre investissement initial.

Nous vous voyons venir : « ça y est, ils sont ruinés » vous dites vous …

Peut-être pas tout-à-fait. Rappelez-vous cher lecteur : nos daubasses bénéficient, globalement d’une jolie petite tirelire, représentée par la trésorerie nette positive de 11 059 euros.

Autrement dit, nous avons de quoi « tenir » presque 16 mois avant que nos entreprises ne doivent faire appel aux banquiers pour financer leur cycle d’exploitation. Sera-ce suffisant pour attendre un retour à une meilleure fortune ? Rendez-vous à la mi 2010 et vous saurez alors si les adorateurs de Graham qui animent ce blog ont mis correctement en application les enseignements de leur idole …

 

ou s’il ne leur restera plus que leurs yeux pour pleurer…

Analyse financière adaptée aux daubasses (6)

6e partie : l’ «EBITDA»

Nous avons vu que les sociétés que nous avons en portefeuille présentent une structure bilanciaire prudente (leur fond de roulement est positif), qu’elles sont fortement sous évaluées (la valorisation est largement inférieure au fond de roulement net et plus encore à l’actif net tangible), qu’elles disposent d’une très bonne solvabilité et même d’excédents de cash.

Mais alors, qu’est-ce qui cloche docteur ? 

Ben oui, vous l’aurez deviné : en tant que daubasses dans toute leur splendeur, elles se doivent de présenter une rentabilité médiocre, voir par de rentabilité du tout.

Lorsque les résultats de l’année 2008 seront disponibles, nous vous donnerons le PER global de notre portefeuille et une chose est d’ores et déjà certaine : ce ne sera vraiment pas folichon et nous vous présenterons penauds et confus, une perte globale.

Chers lecteurs, vous voilà donc prévenus …

C’est pourquoi, pour la énième fois, nous vous rappelons que nous n’avons pas acheté des entreprises mais bien des stocks, des créances ou du cash.

Ce qu’il convient de vérifier, c’est que les entreprises qui composent notre portefeuille auront bel et bien les moyens de « tenir » le temps nécessaire pour, au choix :

– attendre la fin de la récession (ou de la dépression, les « experts » ne se sont pas encore déterminés sur ce qui nous attends)
– voir les effets des restructurations entamées
– obtenir un bon prix pour être vendues à un concurrent
– …………..

Pour ce faire, nous vous proposons d’utiliser un instrument qui, contrairement au fond de roulement, est souvent utilisé pour évaluer les entreprises (à notre avis à tort, du moins comme instrument de valorisation, à l’occasion, nous vous dirons pourquoi nous pensons cela) : l’EBITDA (Earning Before Interest, Tax, Depreciation and Amortisation). En français : l’excédent brut d’exploitation (ou EBE).

Cet excédent se calcule en ajoutant au résultat d’exploitation, les charges non décaissées c’est-à-dire n’ayant pas donné lieu à une « sortie d‘argent ». Comme son nom l’indique, on le calcule en ajoutant au résultat opérationnel les amortissements et les réductions de valeur sur actif.

L’intérêt de calculer ce ratio, c’est qu’il nous permet de vérifier que, en dehors de ses investissements de maintien qu’elle peut éventuellement repousser d’un an ou deux en attendant des jours meilleurs, la société ne consomme pas, en période de basse conjoncture, trop de cash.

Et pour nos daubasses, qu’en est-il docteur ? Et bien nous le verrons dans une prochaine rubrique.