C’est l’histoire d’un mec qui vit à Paris, parisien d’adoption, qui se rend à Bruxelles rencontrer ses trois associés belges. Parce que c’est vrai, il les connait depuis des mois, voire des années pour certains, travaillent avec eux mais ne les a jamais rencontré physiquement !
Direction Gare du Nord pour prendre le Thalys. Paris-Bruxelles : 2 heures. C’est étonnant comme c’est près… Les parisiens qui me lisent et qui mettent tous les matins plus d’une heure pour aller travailler pourraient tout aussi bien venir de Belgique… Bref, je me rends donc dans la capitale de nos voisins francophones. Quelle surprise, la ville lumière, la première ville de Belgique est une véritable capitale internationale ! Tout est indiqué en belge, heu français… , et en charabia. Il paraît que c’est du flamand. Intriguant tout ça, je me demande si les gens comprennent mon dialecte parisien. Parlent-ils également la langue de Molière ?
Le guichetier auquel je m’adresse pour le ticket de métro me rassure : on parle bien quelque chose qui se rapproche du français. Un espèce de français ancien. Comme si quelqu’un du Doubs avait passé ses vacances en Suisse… les roulements de « rrrrr » en plus. Sympa, malgré le froid et le rapide trajet, le parisien est bien dépaysé. Le sourire aux lèvres, il attend avec impatience d’entendre un « une fois » et une petite histoire belge. Les minutes avançant, la hâte de rencontrer ses acolytes se fait pressante.
Une remarque importante pour nos lecteurs francophones de France. Même si la Belgique est aussi vaste qu’une région française, il faut savoir que le belge est fier de ses origines et qu’il ne faut pas confondre Bruxelles et les autres régions et les considérer comme partie intégrante de la banlieue bruxelloise. Il y a bien des disparités entre toutes les régions. Quelques précisions : Bruxelles est francophone, mais le flamand y est aussi une langue officielle. Pour la petite anecdote, historiquement, d’après ce que j’ai compris, la ville est flamande, et petit à petit, les (vilains) francophones sont venus coloniser la ville et ont imposé leur langue. Alors pour se protéger de cette tache d’huile franco-belge, les flamandphones ont imposé le flamand comme langue officielle tout autour de Bruxelles. Ce qui fait que d’usage tout le monde parle français dans les communes autour de Bruxelles, mais que toute démarche administrative doit être effectuée en flamand. Sinon, votre interlocuteur n’est pas censé vous répondre. Bon, ok, pour nous ça paraît compliqué, mais en Belgique c’est un jeu important, les gens se battent pour ça. Il y a même des luttes pour se protéger les uns des autres. Attention, ce grand pays de 10 millions d’habitants risque même la scission entre flamands et wallons. C’est une véritable guerre qui se mène aujourd’hui pour reconquérir le royaume. Un séisme international se joue là, aux portes de la France.
Wahou, ça fait peur ! J’ai écouté mes amis belges me raconter tout ça… même si en fait je ne comprenais pas très bien les enjeux et comment économiquement, culturellement, si le pays connait une division, deux Etats peuplés de 5 millions d’habitants vont pouvoir exister. Bon, ok, c’est vrai qu’aujourd’hui il n’y a pas de gouvernement et que les belges ont menacé le monde de ne plus se raser jusqu’à nouvel ordre si un gouvernement ne se forme pas rapidement. A l’heure qu’il est, le roi des belges ne doit pas faire son malin. Ha oui, parce que je ne vous ai pas dit : les belges ont un roi. Ils ont les moyens, eux ! Je ne sais plus à quoi il sert, je crois que c’est le roi de la blague ou quelque chose comme ça…
Au-delà de Bruxelles, il y a donc la province avec de grandes villes comme Charleroi. Apparemment une ville intéressante d’un point de vue politique… Pas sûr d’avoir tout compris, Pierre vous expliquerait mieux que moi. Il y a aussi une région (ne rigolez pas, les belges appellent « ça » des régions), proche du Luxembourg qui est une ancienne région luxembourgeoise aujourd’hui annexée à la Belgique. C’est là que les découvertes linguistiques et phoniques sont les plus intéressantes. Autant un parisien comprend le presque-bruxellois-qui-est-censé-parlé-flamand, plus on s’éloigne de Bruxelles, plus la francophonie des autochtones devient un exercice d’écoute et de concentration. Poétique et folklorique, certes, mais peu évident pour échanger. Rassurez-vous cher lecteur, c’est aussi dans ces coins reculés de la Belgique, que sont conçus les meilleures bières d’Abbaye, ceci expliquant peut être cela…
Après cette mise en bouche linguistique et politique sur la Belgique partagée autour d’un repas, mes amis me proposent une visite rapide des lieux incontournables de la capitale pour un touriste. Le français que je suis, issu de Paris, a en tête la Tour Eiffel, Notre-Dame, l’opéra Garnier, les Champs Elysées comme références. Je suis ravi. Mes associés belges m’invitent à aller à la rencontre d’une célébrité belge : Michaël Pisse, qui signifie le-petit-homme-qui-fait-pipi en vieux bruxellois. Alors pour vous la faire courte, c’est un enfant qui a sauvé Bruxelles des flammes en urinant sur un début d’incendie au XVIIème siècle. C’est devenu une célébrité là-bas. On lui a donc consacré une statue-fontaine d’au moins… 75 cm qui est déguisée pour diverses occasions. Dommage, lors des périodes de noël, nous n’avons pas eu la chance de le voir avec son costume de Père Noël. Il paraît qu’il met aussi l’apparat de Spirou, le célèbre groom, lors de son anniversaire. Un incontournable. Nous ne sommes pas arrêtés en si bon chemin. Mes acolytes m’ont amené au fin fond d’un rue lugubre, où ces malins de bruxellois ont édifié une statue de la soit-disante copine de Michael : Janette Pisse. Un autre monument de standing pour réguler l’afflux touristique de la capitale européenne. Je ne me souviens plus si elle aussi urinait…
Toutes ces découvertes nous ont donné soif et nous avons donc terminé la journée à goûter la bière du pays. Rafraichissante mais tonique, il ne faut pas en abuser ! Autour de ses mousses, un peu « pinté », ce n’est finalement pas le français qui a le plus rigolé.
« Les gars, il faut trouver plus de daubasses éligibles au PEA. Vous n’avez pas l’air de comprendre, mais pour les français c’est le seul moyen d’investir intelligemment sans se faire plumer par le fisc ! ». Mes remarques franco-françaises sont entendues… mais elles ont un écho tout relatif dans la tête de mes interlocuteurs. Est-ce la bière ? Non, pas du tout. Les plus-values sur capitaux ne sont pas taxées en Belgique (si vous êtes français, relisez cette phrase une deuxième fois pour bien l’assimiler). Alors avec notre PEA qui nous protège de l’imposition sur les plus-values – au-delà de 8 ans de détention et sous la contrainte d’investir uniquement dans des sociétés européennes sans toutefois échapper aux taxes sociales – ce sont maintenant au tour des belges de rire un peu. Et si je prenais ma retraite pour un paradis, un paradis à deux heure de Paris où la bière coule à flot et où il fait bon investir ?
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