Tsunami dans le portefeuille daubasses 2 🌊🇯🇵

Le Portefeuille daubasses 2 a connu un chamboulement au mois d’octobre avec la vente de 14 lignes japonaises. Ce recentrage peut sembler un peu brutal mais il nous semble ĂȘtre un mal pour un bien.

Comme nous l’avons expliquĂ© sur le forum, le marchĂ© japonais prĂ©sente des spĂ©cificitĂ©s qui en font une place financiĂšre Ă  part. Tout d’abord, sa profondeur. Il y a prĂšs de 4 000 sociĂ©tĂ©s cotĂ©es au Japon, c’est considĂ©rable et nombre de ces sociĂ©tĂ©s ne bĂ©nĂ©ficient d’aucun suivi d’analyste. Cela permet de dĂ©nicher des dĂ©cotes incroyables car hors des radars pour la plupart des investisseurs institutionnels mais cela limite aussi grandement leur visibilitĂ© et leurs multiples de valorisation. Autre spĂ©cificitĂ© nippone, la gestion des affaires obĂ©it Ă  des rĂšgles bien particuliĂšres (en tout cas de notre regard d’investisseurs europĂ©ens). Les dirigeants ont une vision multigĂ©nĂ©rationnelle et bien souvent leur principales prĂ©occupations sont la pĂ©rennitĂ© de l’entreprise, la stabilitĂ© des relations avec les clients et les fournisseurs, et le maintien de l’emploi coĂ»te que coĂ»te. Cette vision conduit Ă  un excĂšs de conservatisme du point de vue de l’actionnaire et explique que beaucoup de sociĂ©tĂ©s japonaises croulent sous les liquiditĂ©s.

Dans ces conditions, des petites entreprises dĂ©cotĂ©es, trĂšs peu suivies par la communautĂ© financiĂšre, peuvent le rester longtemps. Il y a selon nous un coĂ»t d’opportunitĂ© non nĂ©gligeable Ă  long terme.

Ce constat nous a conduit Ă  adapter notre process en ajoutant deux nouveaux critĂšres (taille + liquiditĂ©) pour les daubasses japonaises : une capitalisation boursiĂšre supĂ©rieure Ă  100 millions de dollars et un flottant d’au moins 50%. Ainsi, nous pensons pouvoir cibler des entreprises avec une gouvernance plus Ă  mĂȘme d’attirer des investisseurs Ă©trangers et davantage prĂ©occupĂ©e par la crĂ©ation de valeur, faisant l’hypothĂšse que les surcapitalisations des bilans ne sont pas tenables si l’entreprise est visible et dispose d’un gros flottant. Si tel est le cas, des actionnaires activistes pourraient entrer au capital pour secouer le cocotier.

Le Portefeuille daubasses gagne ainsi en « qualité ». En tĂ©moigne la baisse du nombre de net-nets au profit de sociĂ©tĂ©s RAPP (pour RentabilitĂ© À Petit Prix) et un retour sur fonds propres moyen en hausse.

Les net-net et net-estate japonaises toujours en portefeuille affichent un retour sur fonds propres (ROE) moyen de 5,2% contre 1,5% pour les 7 net-net vendues en octobre. Pour les RAPP, il s’établit en moyenne Ă  9,9% contre 6,1% pour les 5 RAPP vendues.

Avec un retour sur fonds propres plus Ă©levĂ©, nos daubasses ont plus de chances d’attirer de nouveaux investisseurs. Et ce d’autant plus que la plupart d’entre elles dĂ©tiennent de nombreux actifs non opĂ©rationnels (liquiditĂ©s, titres de participation, immobilier locatif, 
), qui donnent une image biaisĂ©e de leur rĂ©elle capacitĂ© Ă  crĂ©er de la valeur.

Pour mesurer Ă  quel point les bilans surcapitalisĂ©s de nos daubasses pĂ©nalisent le niveau de crĂ©ation de valeur perçu, nous avons calculĂ© sur l’exercice 2022 un retour sur fonds propres en excluant de la valeur des capitaux propres : la trĂ©sorerie nette, les titres de participation et l’immobilier locatif.

Ces actifs dormants et souvent peu rĂ©munĂ©rateurs peuvent peser lourd dans les bilans de nos daubasses. L’écart entre le retour sur fonds propre « brut » et notre retour sur fonds propres retraitĂ© (= calculĂ© sur la base des actifs qui contribuent rĂ©ellement au fonctionnement de l’entreprise) est donc loin d’ĂȘtre minime.

Retour sur fonds propres daubasses japonaises – exercice 2022 (brut vs retraitĂ©)

Pour les net-nets et net-estates du portefeuille, le retour sur fonds propres retraitĂ©s (rĂ©sultat opĂ©rationnel courant / (fonds propres – trĂ©sorerie nette – titre de participation – immobilier non opĂ©rationnel)) s’établit en moyenne Ă  16,7% contre un chiffre brut (rĂ©sultat opĂ©rationnel courant / fonds propres) de 6,6%. Pour les RAPP il est de 31,1% contre 13,1%.

Qu’en dĂ©duire ? Si ces sociĂ©tĂ©s allouaient leur capital de maniĂšre plus dynamique (augmentation du dividende, rachats d’actions, investissements, 
), elles seraient sans doute vues d’un autre Ɠil par le marchĂ©.

On espĂšre qu’avec nos deux nouveaux critĂšres, nos daubasses vont gagner en visibilitĂ© et attirer des actionnaires enclins Ă  faire bouger les choses. Vous aurez d’ailleurs remarquĂ© que 3 de nos 4 nouvelles acquisitions ont un activiste au capital :  [masquĂ©], [masquĂ©], et [masquĂ©]. La prĂ©sence de ces activistes pourrait ĂȘtre un accĂ©lĂ©rateur de crĂ©ation de valeur actionnariale : moins de trĂ©sorerie dormante et de participations croisĂ©es, plus de dividendes et de rachats d’actions.

Un retour sur fonds propres plus Ă©levĂ©, c’est Ă©galement un Ă©lastique prix-valeur qui va se tendre plus rapidement. Si les choses ne bougent pas suffisamment au niveau de la gouvernance pour que la dĂ©cote se rĂ©duise, la crĂ©ation de valeur devrait tout de mĂȘme soutenir le cours de bourse dans la durĂ©e.

Investissements au Japon : 1er bilan

La vente de ce lot d’actions japonaises marque un tournant dans notre approche pour ce marchĂ©. Nous serons plus exigeants Ă  l’avenir avec dĂ©sormais trois critĂšres spĂ©cifiques pour le Japon : 1. comptes consolidĂ©s, 2. capitalisation boursiĂšre supĂ©rieure Ă  100 millions $ et, 3. flottant supĂ©rieur Ă  50%, en plus de nos critĂšres daubasses habituels.

C’est donc une petite page qui se tourne dans notre aventure au pays du soleil levant et l’occasion de dresser un 1er bilan des positions vendues.

Nous nous sommes sĂ©parĂ©s de 17 lignes depuis nos dĂ©buts sur ce marchĂ© en mars 2019 : 9 net-nets, 6 RAPP et 2 sociĂ©tĂ©s ‘diversification dans la valeur’ :

La performance moyenne non pondĂ©rĂ©e des lignes vendues (dividendes inclus) est de +16,5% en devises et de -1,5% en euros. Un premier constat s’impose : les pertes de change ont lourdement pesĂ© dans la balance avec un Ă©cart moyen de 18 points entre la performance moyenne en yen et celle en devise.

On aurait difficilement pu imaginer un pire scĂ©nario pour la devise nippone. AprĂšs avoir marquĂ© un point haut en mai 2020 au dĂ©but de la crise du covid (1 EUR = 115 JPY), le yen n’a cessĂ© de se dĂ©prĂ©cier par rapport Ă  l’euro pour atteindre un niveau historiquement bas (1 EUR = 145 JPY) en octobre 2022.

Le yen a la rĂ©putation d’ĂȘtre une valeur refuge. Il a bien jouĂ© ce rĂŽle dans les premiers mois de la crise sanitaire avant de s’enfoncer inexorablement en raison d’un dĂ©calage croissant entre (i) la politique monĂ©taire toujours ultra accommodante de la banque centrale du Japon qui a maintenu son taux directeur inchangĂ© Ă  -0,1% et poursuivi ses achats massifs de dette sur le marchĂ© et (ii) le durcissement progressif de la politique monĂ©taire de la banque centrale europĂ©enne.

L’évolution des paritĂ©s de change est dĂ©pendante de facteurs politiques et macro-Ă©conomiques et demeure totalement imprĂ©visible. Le seul moyen de s’en prĂ©munir est de se couvrir contre ce risque en empruntant des devises. Mais cette couverture engendre un coĂ»t supplĂ©mentaire qui augmente au fur et Ă  mesure que le temps passe et qui in fine impacte aussi la performance. Pas non plus la panacĂ©e.

Nous vous présentons ci-dessous une synthÚse de la performance des lignes vendues, en euro et en yen.

SynthĂšse de la performance en euro

– performance moyenne des lignes vendues : -1,5%

– lignes en gain : 8 (6 net-net et 2 RAPP) / gain moyen : +60%

– lignes en perte : 9 (3 net-net, 4 RAPP, 2 ‘diversification valeur’) / perte moyenne : -18%

– nombre de bagger : 1

SynthĂšse de la performance en yen

– performance moyenne des lignes vendues : +16,5%

– lignes en gain : 12 (9 net-net, 2 RAPP, 1 ‘diversification valeur’) / gain moyen : +54%

– lignes en perte : 5 (4 RAPP, 1 ‘diversification valeur’) / perte moyenne : -11%

– nombre de bagger : 2

Nous n’allons pas trop nous Ă©tendre sur ces chiffres car les sociĂ©tĂ©s vendues l’ont Ă©tĂ© en raison d’un changement dans notre process. Et notre aventure au Japon est loin d’ĂȘtre terminĂ©e, on recule pour mieux rebondir. On a appris en espĂ©rant ĂȘtre devenus de meilleurs investisseurs. Mais soyons honnĂȘtes, pour l’instant la performance est en-dessous de nos attentes.

Le tableau n’est cependant pas complĂ©tement noir. Il y a eu de belles histoires (Geomatec, Mutual Corporation, Yotai Refractories) et les baisses ont globalement Ă©tĂ© limitĂ©es avec une plus mauvaise performance en devise de -22,1% pour Kunimine, alors que quelques-unes de nos ex-daubasses ont traversĂ© deux marchĂ©s baissiers majeurs (2020 et 2022).

On notera d’ailleurs que toutes les net-nets affichent une performance positive en devise. Les pures dĂ©cotes sur actifs ont Ă©tĂ© davantage Ă©pargnĂ©es dans les marchĂ©s baissiers. Pour les RAPP, les rĂ©sultats sont plus alĂ©atoires avec du trĂšs bon (Yotai Refractories, Mutual Corporation) et du moins bon (Kunimine, Nisso, Tomita).

Ces premiers pas au Japon ont Ă©tĂ© instructifs et mĂȘme si le bilan financier est dĂ©cevant pour le moment, nous pensons ĂȘtre mieux armĂ©s pour dĂ©jouer les piĂšges de ce marchĂ© Ă  l’avenir.

Comme nous vous l’avons annoncĂ© sur le forum, nous allons assurer le suivi de nos ex-daubasses jusqu’à la prochaine publication trimestrielle (30.09.2022).

Notons enfin que la vente de ce lot d’actions japonaises nous a permis de redĂ©ployer une partie des liquiditĂ©s encaissĂ©es sur le marchĂ© amĂ©ricain, terrain de chasse historiquement profitable pour les daubasses (cf. notre Ă©dito « Portefeuille daubasses 1 : on vous dit tout »).

L’achat de ces 5 net-net amĂ©ricaines permet d’ajouter une touche de diversification au portefeuille, avec des profils de sociĂ©tĂ©s bien diffĂ©rents de nos daubasses japonaises, principalement des dĂ©cotes significatives sur la trĂ©sorerie nette.

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